Société

LES RELIGIONS CONTRE LES FEMMES Par Nassira Belloula

JEUDI 12 NOVEMBRE 2015

Quand quelque chose échappe à l’homme, il se réfugie dans la religion, mettant ainsi un rempart entre lui et la chose incomprise et souvent cette « chose » incomprise est la femme. Sa faiblesse vient du fait qu’il ne peut pas regarder la femme comme étant son égal, un être fait de chair et de sang mais aussi d’intelligence et de spiritualité. De tous les temps, des croisades à l’inquisition, des invasions à l’instauration des états théocratiques chrétiens, judaïsés ou musulmans, la femme n’échappe pas à son sort et est écarté non seulement des décisions importantes mais violentée pour la maintenir dans un état d’infériorité et de soumission. Dans la religion judaïque, les hommes remercient Dieu dans leurs prières quotidiennes de ne pas les avoir fait naître femmes, et que l’accès des textes sacrés leur reste réservé…Les commentaires de la Torah disent : « Mieux vaut brûler le Torah que de le confier à une femme ». Dans le christianisme, une religion qui a pourtant comme forte symbolique une femme ; Marie qui porta Jésus dans son sein un incroyable modèle de force et de persévérance le statut de la femme n’est guère enviable ; Saint Augustin écrivit à ce sujet « Je ne vois pas quelle utilisation peut faire l’homme de la femme, si on exclut la fonction d’élever les enfants » Augustin a par ailleurs puisé dans Platon sa conception fondamentale des rapports entre les sexes.
Les femmes doivent être soumises et subordonnées aux hommes comme le corps l’est à l’âme. Cela peut paraître aujourd’hui excessif, ce genre de pensée et de réflexion, certains diront même que ce sont là des attitudes archaïques, pourtant ces raisonnements sont partagés et adoptés par des hommes que des années lumière séparent de Saint Augustin. Comme si le temps s’est figé sur cette question de la femme. Or, il ne faut pas comprendre par là, que les religions sont la première cause de l’oppression des femmes. La genèse de la condition féminine a pris ses racines bien avant la naissance des religions actuelles. Sauf que les religions ont largement contribué au maintien de la femme dans une condition de sous-être, confinée juste dans un rôle de productrice et crée surtout pour le bien être de l’homme « Femmes, soyez soumises a vos maris, comme au Seigneur… or, de même que l’Église est soumise au Christ » texte de la Bible. Suivant les prescriptions bibliques, la classe dirigeante de la société était masculine et la femme tenue à l’écart du domaine public et du pouvoir, son rôle principal étant la procréation (notons que le judaïsme se transmet par la mère) et la tenue du foyer. Sur la question des femmes, les religions à l’origine s’égalaient, on pense aujourd’hui au foulard islamique mais comment ne pas penser aux femmes des milieux juifs religieux qui doivent soit cacher leur chevelure, soit se raser la tête et porter perruque. Il est question aussi du voile dans les églises : « L’homme, lui, ne doit pas se couvrir la tête, parce qu’il est l’image et le reflet de Dieu ; quant à la femme, elle est le reflet de l’homme»… «Voilà pourquoi la femme doit avoir sur la tête un signe de sujétion, à cause des anges ». La pratique du voile est plus antérieur que cela, selon le spécialiste Jean Bottéro ([1]) dans la Babylone antique, « il semble avoir été réservé aux femmes mariées tandis que les femmes circulant dans les rues ou les places publiques, c’est-à-dire souvent des prostituées, avaient au contraire l’interdiction de le porter. Il convenait de faire la différence, c’était des filles publiques, tandis que le voile des épouses signifiait : attention, propriété privée ! Défense de toucher et même de voir ! » Les religions ont inculqué parmi les femmes des sentiments de soumission et d’infériorité. Ce qui a contribué à faire durer cette iniquité jusqu’au 21ème siècle.
( A suivre)

[1] Spécialiste français de la Bible et du Moyen Orient antique, Jean Bottéro est né en 1914 en Provence. Après le petit séminaire à Nice, il entre chez les Pères dominicains, se spécialise dans l’exégèse biblique, puis dans la Mésopotamie antique (il traduit le Code d’Hammourabi). Il quitte la prêtrise et passe au Centre national de la recherche scientifique. Il participe à des fouilles au Moyen Orient et entre à l’Ecole pratique des hautes études, où il deviendra directeur d’étude (chaire d’assyriologie). Il a publié de nombreux ouvrages, notamment «Gilgamesh», «Naissance de Dieu», «La plus vieille cuisine du monde», «Babylone et la Bible» (entretiens), «Au commencement étaient les dieux».
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