Économie

L’impérialisme du billet vert par: Abdelatif Rebah

telechargement_5_.jpgL’impérialisme du billet vert
Ou la réalité crue de ce monde dollarisé qui fait des structures financières des pays particuliers et des organisations entières les jouets impuissants des visées géostratégiques des Etats-Unis.
Des banques et non des moindres sont condamnées à payer de très lourdes amendes pour avoir enfreint l’embargo décrété par les Etats-Unis contre tel ou tel Etat par eux blacklisté.
Le Département des services financiers de l’Etat de New York (NYDFS) l’a annoncé récemment, la Deutsche Bank, la première banque allemande, coupable(sic !) d’avoir effectué des transactions avec des pays sous embargos économiques américains, dont l’Iran et la Syrie, devra verser aux USA une pénalité de 258 millions de dollars. La Deutsche Bank payera 200 M USD pour viol de sanctions antirusses
En septembre 2015, les autorités américaines ont accusé la banque française Crédit Agricole de transferts illégaux d’argent sur des comptes iraniens et soudanais. Au final, Crédit agricole a accepté de payer une amende de 787 millions de dollars pour mettre fin aux enquêtes sur des soupçons d’opérations financières au profit d’individus ou de pays visés par des sanctions économiques des Etats-Unis.
Commerzbank, deuxième banque allemande et qui fait partie des 20 principales institutions bancaires d’Europe, va devoir payer 1 milliard de dollars au gouvernement américain pour «transactions illégales (sic !) entre ses filiales américaines et des partenaires à Cuba, en Corée du Nord, en Iran, ou au Soudan».
Plusieurs autres banques internationales, principalement européennes, ont déjà conclu avec différentes autorités américaines des accords portant sur des pénalités pour un montant global de près de 14 milliards de dollars depuis 2009.
L’an dernier, BNP Paribas avait versé un montant record de 8,97 milliards de dollars aux Etats-Unis. Motif de la punition : le commerce avec Cuba, l’Iran et le Soudan, pays qui sont placés sous embargo américain. Ces transactions, il faut le souligner, ont été réalisées à travers la filiale genevoise de la banque franco-belge. Des têtes ont également été exigées. Résultat : une trentaine de hauts cadres de BNP Paribas licenciés en quelques mois. Pour pouvoir conserver sa licence, la banque a dû, de plus, accepter de suspendre pour un an, à partir du 1er janvier 2015, ses opérations de compensations en dollars sur les marchés du pétrole et du gaz.
Qui a puni ? C’est la justice américaine ! Comment a-t-elle pu punir des actes d’une banque française — et la France n’avait tout simplement pas d’embargo financier vis-à-vis des pays incriminés pendant la période en cause (2002-2009) — quand ces actes se sont déroulés en dehors du territoire américain et ne relèvent donc pas de la juridiction des Etats-Unis ?
Aucune règle du droit international ne le justifie donc. Sauf que, dès lors que des flux en dollar sont impliqués, le droit états-unien prévaut sur l’ensemble des pays de la planète. Si le commerce avec les pays sous embargo américain avaient été réalisé dans une autre monnaie que le billet vert, BNP Paribas ne serait pas tombée sous le coup des lois américaines. BNP Paribas ne pouvait opposer une résistance à ces sanctions illégitimes s’il ne voulait pas, tout simplement, subir une interdiction d’utilisation du dollar. Ce n’est pas la seule opération de racket pour cause de non-alignement sur la politique des Etats-Unis.

Le principal analyste de la Banque fédérale de Brême Folker Hellmeyer s’est également exprimé en la matière. Comme la Deutsche Banque est située en Europe, il paraît bien étrange que ce soient les Etats-Unis et non l’Union européenne, institution politique indépendante, qui jouent le rôle du juge principal en menant leur propre enquête contre la banque allemande, a souligné M.Hellmeyer.
Abordant la question des sanctions imposées par Washington, l’analyste a dit qu’elles « liaient les mains de l’Union européenne, l’empêchaient de participer activement aux processus du développement à l’Est et entravaient notre développement économique ». Il a toutefois apprécié l’importance, pour l’Europe, de la collaboration avec les marchés orientaux..

  • Comme l’explique un spécialiste de l’euro et des questions monétaires… «le «privilège exorbitant» du dollar revient à faire des Etats-Unis la banque des échanges du monde, même dans le cas où rien de ces échanges ne transite par les Etats-Unis — ce qui permet à l’autorité politique américaine d’exercer des pressions et des contraintes sur, en somme, le reste de la planète».

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