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La colonisation de la Palestine : invariants, spécificités et … centralité dans la lutté anti-impérialiste mondiale

    Kamel B     19 novembre 2023

Liminaire : pourquoi qualifier la situation en Palestine de colonisation

La qualifier ainsi fait partie de la lutte des idées, et donc de la lutte des classes, tant pour le peuple palestinien que pour ses soutiens.

C’est reconnaître quela lutte du peuple palestinien est une lutte de libération nationale. Carc’est en niant ce caractère de lutte de libération nationale d’un peuple et l’occupation de son territoire que l’entité sioniste et ses sponsors impérialistes serinent le droit de se défendre et considèrent chaque acte de résistance comme du terrorisme.

C’est pourquoi il n’est pas suffisant que des ONG décrivent cette situation coloniale seulement par à un apartheid, un nettoyage ethnique, ou encore un racisme. 

La réalité vécue par le peuple palestinien est fréquemment comparée à celle du peuple sud-africain qui, lors de la colonisation germano-anglaise de l’Afrique du Sud, a subi le racisme d’État, l’apartheid et vu son territoire fragmenté par la création de bantoustans. 

Si les similitudes sont avérées (notamment vis-à-vis des Palestiniens dits de 1948), et forts utiles par ailleurs pour le développement de la solidarité, il reste qu’une différence essentielle ne peut être ignorée : le peuple d’Afrique du Sud n’a pas été expulsé intégralement de son territoire et n’a pas vu une partie importante de ce peuple expulsé et subir la condition de réfugiés et exilés en si grand nombre (5 millions de réfugiés, 4 millions dans les pays arabes, 500.000 dans pays occidentaux),

Le racisme et l’apartheid ne sont que des outils, devenus indispensables, pour la colonisation sioniste par l’expulsion et le vol de la terre.

Cette inversion de la cause (la colonisation) et de ses conséquences, consciente ou inconsciente, éloigne grandement de la réalité et, surtout, ouvre la voie à des positionnements politiques stériles :

1/ Elle nourrit l’illusion que la résolution de cette situation ne nécessite pas la libération de la Palestine mais seulement une… “démocratisation” de l’entité sioniste. Une illusion pour certains, une faute politique pour d’autres, et, pour d’autres encore, un détournement conscient de la solidarité avec la lutte du peuple palestinien. Car les dirigeants sionistes n’ont cessé de discourir sur leur volonté d’accaparer la terre (y compris Al Qods) et de pratiquer (depuis 1948) l’expulsion intégrale des Palestiniens hors de leur patrie et pas seulement leur déplacement.

2/ Elle enferme le mouvement de solidarité avec le peuple palestinien, déjà handicapé par la faiblesse historique à gauche de l’anticolonialisme et de l’anti-impérialisme, dans une attitude de solidarité avec des victimes (passives), donc morale et humanitaire. 

3/ Enfin, elle rend confortable la position erronée du NI-NI ou de mise en équivalence des torts entre agressé et agresseur, occupé et occupant. Ce qui revient à s’aligner sur l’agresseur-dominant, en l’occurrence l’impérialisme et le sionisme.

Puisse l’actuel formidable mouvement de solidarité avec la cause palestinienne, notamment dans les métropoles occidentales, se poursuivre et évoluer vers une solidarité avec un peuple acteur de sa propre histoire, en lutte contre le sionisme, l’impérialisme et la réaction pour sa libération nationale.

1/ La Palestine : une colonisation avec tous ses invariants

Comme toutes les colonisations, de peuplement en particulier, celle de la Palestine est une histoire continue de massacres, de déplacements de populations, de démolitions d’habitations et de quartiers entiers, de vol criminel des terres par la saisie, le séquestre-spoliation comme représailles collectives ou pour opérations militaires, … 

Dans un article écrit en 2005, Gilbert Meynier, historien spécialiste de la colonisation (de l’Algérie en particulier), note que « de 1948 à 1970, 385 villages sur les 485 recensés dans la Palestine mandataire, furent détruits, soit 81%. … De 1949 à 1975, les confiscations ont touché entre 70% et 80% des terres palestiniennes cultivées, soit de 280.000 à 320.000 hectares sur un total de 400.000. » 

En même temps, la dépossession massive rend la force de travail palestinienne disponible et prisonnière d’une exploitation à très bon marché : entre 200 000 et 300 000 Palestiniens traversent quotidiennement des postes de contrôle de l’armée sioniste pour se vendre aux entreprises coloniales. 

Ainsi, la colonisation contribue au financement de l’occupation et de l’expansion coloniale. Cf. article de Abdelhadi Hantach, expert dans les affaires foncières dans El Hadef 29 mars 2023

Racisme, discriminations, répression, rafles et emprisonnement de masse et torture deviennent le lot quotidien du peuple palestinien.

L’emprisonnement de masse vise à terroriser et à briser le mouvement de libération nationale, et empêcher la transmission de la mémoire historique collective des résistances. Résister, y compris retourner sur sa terre, devient un délit, et permet l’entité sioniste de prétendre à la légalité de sa violence coloniale.

Depuis la NAKBA (catastrophe), 120.000 Palestiniens sont tombés en martyrs et 1 million de Palestiniens sont passés par les geôles sionistes.

À fin octobre 2023, 7.000 Palestiniens sont dans les prisons sionistes, dont : 2.070 en détention administrative, 200 enfants, 62 femmes. 

Depuis la NAKSA(défaite ou revers) de juin 1967, ce sont près de 54.000 Palestiniens qui ont été internés administrativement. Certains d’entre eux sont morts en prison sans que leurs familles aient pu récupérer leurs corps : l’administration sioniste a décidé qu’ils ne seront restitués qu’après avoir purger complètement leur peine !

Cf. site palestinien des prisonniers palestiniens Adhameer.

Il faut se rappeler, la détention administrative a été instaurée et légalisée (loi dite spéciale) par les colons britanniques pour réprimer la grande révolte palestinienne de 1936. Le déploiement en grand de cette loi par l’entité sioniste est une autre illustration de la filiation entre le colonialisme britannique et le sionisme

(Cf. Georges Abdellah dans sa déclaration du 17 avril 2023).

Comme invariant des colonisations, on retrouve le discours idéologique de la supériorité de la civilisation occidentale, dont se réclame le sionisme, et de l’infériorisation et la stigmatisation de la population autochtone accusée d’abandonner les terres, de les négliger et de ne pas les exploiter, et la prétention des colons à « faire fleurir le désert ». 

2/ Spécificités de la colonisation de la Palestine

Une première spécificité est que la colonisation sioniste a d’abord été un projet impérialo-capitaliste. 

L’ennemi du peuple palestinien n’est donc pas seulement l’entité sioniste, mais l’ensemble des métropoles impérialistes.

Voir le texte sur la chronologie de la colonisation de la Palestine ainsi que le texte sur l’opération  TOFAN EL AQSA  (Déluge d’El AQSA) du  7 octobre 2023

Cette colonisation n’a pu être réalisée, n’a pu durer et ne dure encore qu’avec l’intervention et le soutien direct militaire, financier, politique et économique des dirigeants impérialistes occidentaux, avec comme chef de file l’impérialisme états-unien.

Dès le début, et aujourd’hui plus que jamais, l’entité coloniale sioniste est rattachée à l’ensemble des métropoles impérialistes occidentales, et non pas à une seule métropole (comme dans le cas des autres colonisations de peuplement. 

Dans toutes les guerres de résistance menées par l’entité sioniste, les Palestiniens et leurs soutiens arabes ont eu à affronter directement les armées du « collectif impérialiste occidental ». 

La pérennité, la sécurité et la suprématie de l’entité sioniste dans son environnement immédiat sont devenues une condition première pour assurer l’hégémonie et le déploiement des projets impérialistes dans la région et au-delà. 

Dès les années 1900, la région est apparue comme un nœud stratégique des échanges commerciaux et une zone de richesses et de profit capitaliste. 

La stratégie impérialiste, franco-britannique au début, puis états-unienne par la suite, s’est alors déployée suivant trois axes principaux :

1/ Faire de l’entité sioniste l’État le plus puissant militairement et économiquement afin de contrer le mouvement de libération national palestinien et les soulèvements des peuples arabes de la région, ainsi que les États potentiellement contestataires et/ou opposants à l’ordre impérialiste

2/ Installer des régimes arabes alliés à l’impérialisme dans les États riches en ressources naturelles et les protéger contre les soulèvements populaires d’une part, et d’autre part défaire les États nationaux obstacles à l’élargissement des zones de profit du capital international

3/ Contrôler, sécuriser et l’exploitation et l’accès aux ressources d’hydrocarbures 

De même, dans de nombreux conflits, la suprématie militaire de l’entité sioniste a permis aux États-Unis d’éviter une intervention directe.

Pour de nombreux pays dirigés par des dictateurs, c’est l’entité sioniste qui assure la sous-traitance pour les États-Unis pour la fourniture d’armes et l’entraînement de commandos (Shah d’Iran, Mobutu au Zaïre, Bokassa en Centrafrique, Amin Dada en Ouganda, Ian Smith en ex-Rhodésie, Afrique du Sud, Suharto en Indonésie, Somoza au Nicaragua, Argentine, Brésil, Chili…).

Ces enjeux, militaires, économiques et géostratégiques, confèrent un caractère central à la lutte de libération nationale palestinienne dans la lutte anti-impérialiste mondiale. 

Tout échec ou affaiblissement substantiel de l’entité sioniste est un recul important de l’impérialisme au niveau mondial. De même que toute avancée du mouvement de libération national palestinien est un point d’appui important au mouvement anti-impérialiste mondial.

Une deuxième spécificité de la colonisation sioniste est l’instrumentalisation outrancière du sacré pour couvrir idéologiquement son entreprise

Le sionisme a instrumentalisé les écritures saintes et propagé une lecture sioniste de la Bible pour imposer une Palestine imaginaire comme terre ancestrale et propriété des juifs supposés être les seuls descendants directs des Hébreux. 

Ce n’est pas sans raison que le mouvement sioniste a choisi d’appeler son État colonial de peuplement « Israël » (le nom donné dans la Torah à Jacob, par lequel les enfants d’Israël deviennent le « peuple juif »). 

Cette instrumentalisation a été développée principalement à partir de trois idées-forces :

1/ La confusion volontaire et entretenue entre lieu de naissance de la foi et origines des populations

Le judaïsme, comme l’islam et le christianisme, est une religion missionnaire. Comme il n’y a pas UN peuple musulman, ni UN peuple chrétien, ni de nationalité musulmane, ni de nationalité chrétienne, le judaïsme n’a donc pas vocation à se définir comme un peuple, et encore moins à devenir une nationalité.  

Les musulmans et les chrétiens répartis dans le monde entier devraient-ils réclamer et retourner aux lieux de naissance de leur foi ? 

Dès sa mise en place, l’entité sioniste va s’employer à s’approprier les vestiges des civilisations cananéenne, babylonienne et arabo-musulmane, jusqu’à « sioniser » les noms des villes.

Voir Annexe 1 les noms d’origine et les noms « sionisés »

Des recherches archéologiques, des fouilles d’antiquités et une publicité obsessionnelle et mensongère vont être financés pour faire accroire à une présence millénaire et majoritaire des juifs en Palestine, alors même que l’hébreu n’y est plus parlé depuis des millénaires (les juifs russes, les plus nombreux dans le mouvement sioniste, parlaient le yiddish) 

L’histoire du Mur d’al-Bourak devenu Mur des lamentations, expression inventée par les mandataires britanniques, est racontée dans la revue électronique en arabe Al-Raya News du 12 avril 2023, notamment le Décret britannique du Mur occidental publié dans l’Official Gazette of the Government of Palestine, Gazette Extraordinary (Suppl. No. 8/1931), June 8, 1931, pp. 464–468.

Le Fonds national juif s’est même employé à organiser des campagnes de plantation de conifères afin de noyer le symbole identitaire des Palestiniens qu’est l’olivier. 

Même le cinéma, états-unien notamment, a été mis à contribution pour sioniser l’histoire de la Palestine (voir les films Moïse, Les dix commandements ou Exodus).

Voir aussi les vidéos de Khazal al-Majidi et Adel Samara, The Political Economy of Zionism (Doroub Publishers, Amman, 2017).

2/ La mise en équivalence entre sémitisme et judaïsme ou la réduction de l’antisémitisme à l’anti-juif

Alors que les sémites – c’est à dire les groupes ethniques parlant une langue sémitique – les plus nombreux sont les Arabes, dont les Palestiniens.

L’« industrialisation » éhontée et massive du génocide juif (renommé holocauste ou shoah en hébreu pour les besoins de la cause), sera le moyen de transformer le racisme du monde aryen (ou « blanc ») en un antisémitisme qui serait « éternel » et principalement arabo-musulman.

Théodore Herzl, considéré comme le fondateur du sionisme, dans son pamphlet de 1896, L’État juif, avait écrit que : « Les antisémites deviendront nos amis les plus sûrs, les pays antisémites, nos alliés ». 

3/ La sionisation du judaïsme ou la mise en équivalence entre sionisme et judaïsme, c’est-à-dire anti-sionisme = anti-juif. 

L’objectif est d’entraîner l’ensemble des juifs (pratiquants et non pratiquants) dans le projet colonial de peuplement, alors même que le judaïsme mondial y était réticent, voire opposé, en application du commandement talmudique de ne pas se regrouper avant la venue du messie.

Il faut rappeler qu’historiquement, le sionisme a pris son envol dans l’Angleterre anglicane

C’est dans le contexte de la Réforme (protestante aux 16e et 17e siècles) et du développement de la phase mercantiliste du capitalisme, que de nombreux plans de colonisation de la Palestine avaient été proposés par des Européens non juifs (religieux et athées), et ce, bien avant Theodor Herzl (1860-1904). Au cœur de ces plans, figurait l’idée des dirigeants de la Réforme, dont Martin Luther, d’une alliance-réconciliation avec le judaïsme. 

A ce propos, on peut citer Mohameed Elmey Elyassini, professeur de Géographie à l’université d’Etat de l’Indiana(page 68 de son ouvrage « Genesis and Prospect of the Palestine-Israël Conflict », (lien https://www.indstate.edu/faculty-staff/mohamed-elyassini) :    

 « De l’époque de la réforme religieuse en Europe (du 16e au 18e siècle) jusqu’au règne de Napoléon III (1808-1873) en France et le creusement du Canal de Suez (1859-1869), le mouvement sioniste n’a jamais eu de direction juive, malgré les tentatives répétées anglaises et françaises. Une autre illustration de l’origine non juive du sionisme est le simple fait que les idées de « retour » se sont d’abord développées en Angleterre qui, à l’époque, n’avait pas de population juive et non en Allemagne, en Pologne et en Russie, pays où résidait la majorité de la population juive européenne et mondiale. 

Il a fallu près de 100 ans après le règne de Oliver Cromwell (1599-1658) pour que le nombre de juifs en Angleterre atteigne 12.000, puis 100 autres années pour qu’il atteigne 25.000. Tandis que le recensement de l’empire russe de 1897 affichait 5.189.401 juifs, soit 4,13 % de la population totale de l’empire ».  

Voir Annexe 2 sur les juifs en Russie Bolchévique

Une troisième spécificité est le peuplement colonial sioniste. 

Il est en réalité un regroupement de populations issues de plus de 40 pays, de différentes nationalités et différentes cultures, (beaucoup ont en gardé la nationalité), et dont le seul point commun est l’appartenance ou la proximité avec la religion juive

La prétendue nationalité ainsi construite a une essence religieuse et confère à l’entité sioniste un caractère foncièrement théocratique et suprémaciste. 

Cf. Shlomo Sand, Comment le peuple juif fut inventé (Fayard, 2008) et Comment la terre d’Israël fut inventée (Flammarion, 2012). 

Comme dans les autres colonisations de peuplement, la question de l’avantage démographique, conditionne la poursuite et la permanence de la colonisation

C’est pour créer une majorité juive (sioniste) que l’entité sioniste a débuté en 1948 par l’expulsion, le déplacement et la fragmentation du peuple palestinien hors de Palestine, vers les pays arabes voisins. 

Mais à la différence des autres colonisations qui avaient opté pour l’exploitation massive et généralisée de l’ensemble de la main-d’œuvre autochtone (rendue bon marché par la force des armes), et par crainte de demeurer une minorité démographique, les dirigeants sionistes ont continuellement agi pour expulser les Palestiniens hors de Palestine.

Le projet sioniste comprend dès ses débuts l’idée de « transférer », c’est-à-dire de déporter les Palestiniens et cette possibilité n’a jamais été abandonnée par les dirigeants de l’entité sioniste. 

Le 12 juin 1895, Theodor Herzl, a été le premier à justifier le « transfert » des Palestiniens : « Peu à peu nous devons nous rendre maîtres des terres, privées de leur propriétaire, dans les régions où nous nous installerons. Nous essayerons de transporter les couches les plus pauvres [des Arabes] au-delà des frontières, tranquillement, sans susciter de remous, en leur fournissant du travail dans les États où ils seront transportés. Mais nous ne leur accorderons pas du travail dans notre pays. […] Aucune terre ne leur sera jamais revendue. » 

Plus tard, en décembre 1940, Yosef Weitz, responsable du développement des terres au Fonds national juif, déclarera : « Il faut que ce soit clair qu’il n’y a pas de place pour deux peuples dans ce pays… La seule solution est la terre d’Israël, du moins la terre occidentale d’Israël, sans Arabes. Il n’y a pas de solutions médianes, ici. Il n’y a pas d’autres moyens sinon le transfert [l’expulsion] des Arabes d’ici vers les pays voisins, les transférer tous… Il faut qu’il ne reste aucun village, aucune tribu, tous doivent être transférés vers l’Irak et la Syrie, et même à l’est du Jourdain. Pour exécuter cet objectif, il nous faut beaucoup d’argent. Après le transfert, le pays peut intégrer des millions de nos frères et la solution juive trouvera une fin et une solution. »

C’est pourquoi les colonies sionistes sont militarisées dès leur installation et font ainsi office de postes avancés de l’armée sioniste. Outre le service militaire obligatoire (2 ans et 8 mois pour les hommes et 2 ans pour les femmes), les colons bénéficient d’un entraînement à l’utilisation des armes.

Arnon Sofer, conseiller du gouvernement israélien, avait affirmé en 2005, avant le retrait de l’armée sioniste de la bande de Gaza en 2006

« Si nous voulons rester en vie, il va nous falloir tuer, tuer et tuer encore. Tous les jours, chaque jour. Si nous ne tuons pas, nous cesserons d’exister. La seule chose qui m’inquiète, c’est la façon de nous assurer que les garçons et les hommes qui vont devoir se livrer aux tueries seront à même de retrouver leurs familles et de redevenir des êtres humains normaux. »

Les réfugiés palestiniens sont les témoins vivants du vol de leurs terres, du déplacement et de l’expulsion des Palestiniens hors de Palestine.

En 2020, le nombre de réfugiés aurait dépassé les 5 millions.  

Dès août 1948, David Ben Gourion forme un Comité sioniste de « transfert » pour élaborer des plans de déplacements des réfugiés et leur installation dans les pays arabes afin de réduire la population arabe en Palestine occupée, dans le triple objectif de réduire les centres de résistance ; de créer un avantage démographique ; et de briser l’identité nationale palestinienne en dissociant la question des réfugiés de la question coloniale et du conflit arabo-sioniste.

Le cloisonnement et l’enclavement des villages palestiniens participe également à la fragmentation du peuple palestinien et vise à contenir le sentiment national palestinien.

Des barrières permanentes et temporaires (593 points de contrôle et portes militaires) divisent les villes et villages palestiniens.

De nombreuses interdictions et des restrictions à la circulation des personnes et des biens sont imposées pour les zones A, B et C. 

Les réfugiés-expulsés seront expropriés de leurs biens en vertu de la loi sioniste de 1950, loi dite des propriétaires palestiniens « absents ».

Aucun des pays qui ont subi la colonisation de peuplement n’a connu un tel exode forcé. Les camps des réfugiés et des déplacés après 1967 (données l’UNRWA, janvier 1993) :

  • 10 camps en Syrie : 299 207 réfugiés et 125 000 déplacés en 1967
  • 12 camps au Liban : 319 427 réfugiés
  • 10 camps en Jordanie : 1 010 719 réfugiés et 210 000 déplacés en 1967
  • 20 camps en Cisjordanie : 459 147 réfugiés + 6 728 déplacés en 1967
  • 8 camps à Gaza : 560 207 réfugiés

Les colons sionistes vont systématiquement empêcher le retour des réfugiés et expulsés palestiniens malgré la résolution de l’ONU consacrant leur droit au retour (résolution n° 194 du 11 décembre 1948).

Une loi (promulguée en 1954) existe pour légaliser la ré-expulsion des « infiltrés » après les avoir sanctionnés pendant qu’une autre loi sioniste, dite loi du Retour, donne le droit d’immigrer en « Israël » à tout juif de n’importe quel pays.

Une loi de 1970, définit une personne juive : « Pour les besoins de cette loi, est considérée comme juive une personne née de mère juive ou convertie (au judaïsme) et qui n’appartient pas à une autre religion »

La loi (datant de 1971, qui amende la loi de 1952 sur la nationalité juive) octroie la nationalité à tout juif se trouvant en Palestine avant la création d’« Israël » (1948) ou arrivé après 1948 ainsi qu’aux juifs non installés en Palestine.

Malgré cela, et du fait de l’expansionnisme sioniste par l’annexion toujours plus de territoires peuplés de Palestiniens, le rapport démographique est resté largement favorable aux Palestiniens. Le fort taux de croissance démographique et la structure par âge de la population palestinienne rendront le peuplement colonial encore plus minoritaire. 

C’est pour contourner cette réalité démographique, que les dirigeants de l’entité sioniste ont procédé, en 2018, à la proclamation et à la constitutionnalisation de l’État Juif. 

Voir Annexe 3 sur la population

Une quatrième spécificité :  l’entité sioniste est un cas unique de création d’un État par vote de la Société des Nations (ancêtre de l’ONU)

Le peuple palestinien est le seul peuple qui a été forcé de quitter sa terre en application de la Déclaration Balfour, sans la consultation et l’accord de la population autochtone (donc contraire au droit international alors en vigueur.

Le statut de membre de l’ONU a même été accordé à l’entité sioniste (résolution n° 273 du 11 mai 1949), alors que le peuple palestinien est toujours en lutte pour récupérer sa terre et retourner sur sa terre. 

Toute cette violence a instruit et continue d’instruire et de nourrir la résistance du peuple palestinien. 

Soixante-quinze ans après la colonisation britannique puis la colonisation sioniste, malgré la participation active et continue des métropoles impérialistes occidentales, et leurs alliés réactionnaires arabes, la résistance armée et multiforme du peuple palestinien reste élevée et indique la voie pour résoudre la contradiction irréductible entre colonisateurs et colonisés, à l’inverse des négociations-marchandages et autres solutions liquidationnistes.  

ANNEXE 1 : NOMS SIONISES et NOMS d’ORIGINE des VILLES PALESTINIENNES

Extrait du livre « Pour ne pas oublier » (1997) de l’auteur palestinien Walid EL KHALIDI

Nom PALESTINIENNom SIONISE
AL QODSORSHALIM /JERUSALEM
BAYT LEHMBETLEHEM
AL LLEDLOD
EL KHALILHEBRON
AL NASRANAZARETH
AL NAQABNEGUEV
BIR ESHABABEER SHEVA
AKKAACRE
OUM ERRASHRASHEILAT
QISARYACESAREA
ASQALAN EL MAJDAL ASHKELON
ISDUDASJDOD
BISANBEIT SHE AN
AL JISHGUSH HALAV
TABARIYYATIBERIA
YAFFA TEL AVIV

ANNEXE 2 : Les JUIFS en RUSSIE BOLCHEVIQUE

1917 : Après le triomphe de la révolution Bolchévique et la naissance de l’URSS, les juifs sont considérés comme une minorité religieuse et culturelle, avec la langue, le Yiddish, parlé par plus de 80% des juifs russes.

Les juifs sionistes russes sont majoritaires dans le mouvement sioniste (fondé à la suite du 1er congrès sioniste en 1897.

Le BUND (General Jewish Labor fondé en 1897, avec des sections en Lituanie et en Pologne), se scissionne en 1917 en se séparant de la section polonaise ; tandis que la section russe (majoritaire dans le BUND) se dissout en 1921 dans le Parti Communiste Bolchévique (avec adhésion à titre individuel).

LENINE voit dans l’idée d’un peuple juif spécifique « une idée réactionnaire dans son essence. L’idée du nationalisme juif est en contradiction avec les intérêts des travailleurs juifs, parce qu’elle alimente les idées contre l’intégration et encourage l’esprit du ghetto »

LENINE, lors d’un débat avec les défenseurs de l’autonomie culturelle du BUND en 1903, a insisté sur les points suivants : 

1/ l’idée d’un peuple juif n’est pas scientifique 

2/ le sionisme est l’idée la plus réactionnaire dans le mouvement bourgeois juif 

3/ L’hostilité à l’égard des groupes d’origine étrangère dans la population ne peut être éliminée que lorsqu’ils sont intégrés dans la société et les blocs de population et ne restent pas un élément étranger

STALINE, en 1913, dans son livre « Marxisme et la question nationale », réfute l’idée que les juifs constituent une nationalité, et rappelle que les juifs ne sont unis que par leur religion, tout comme les croyants de toute autre religion 

TROTSKY s’est opposé à l’idée d’une nationalité juive et la fondation d’un Etat juif 

Le KOMINTERN, sur proposition de Lénine, a refusé l’adhésion d’un parti communiste juif russe

1928 (28 mars) : le gouvernement soviétique, sous la direction de Staline, décide de fonder une entité juive dénommée « région autonome juive » sur une base socialiste

L’entité voit le jour en 1934 à l’Est de la Russie, sous le nom de BIROBIDJAN

Le gouvernement soviétique a appelé les juifs d’URSS et du monde entier à y aller pour y vivre

Le mouvement sioniste a considéré la proposition comme une expérience mais non comme une alternative à un Etat national juif en Palestine

ANNEXE 3 : POPULATIONS PALESTINIENNE et COLONIALE SIONISTE

Population Palestine 2022 : +2,4% par an et 60% âgés de moins de 29 ans 

  • Total : 10.854.000
  • Cisjordanie occupée en 1967 : 3.188.000
  • Bande de Ghazza occupée en 1967 : 2.166.000
  • Territoires occupés en 1948 : 1.000.000  
  • Pays arabes : 4.000.000
  • Pays autres (occidentaux) : 500.000

Palestiniens dans les pays arabes : 4.000.000 environ

Jordanie : 3.000.000

Liban :   400.000

Syrie :   400.000

Egypte :   300.000

Population coloniale dans territoires occupés en 1967 (sous administration de l’AP) : 

Près 450.000 colons dont environ 430.000 en Cisjordanie  

Population coloniale au sein de l’entité sioniste : +1,5% par an et environ 15% âgés de moins de moins de 29 ans

  • environ 7.200.000 (hors « Arabes israéliens »)
  • près de 2.000.000 nés à l’étranger dont environ 1.000.000 en ex URSS

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