Kamel B 06 Novembre 2023
Références
Massâd Arbid : « Eclairages sur une catastrophe historique, idéologique et géo-stratégique », 2023 (en arabe), en particulier sur la position de l’URSS et son évolution
Adel Samara : articles dans la revue électronique Kanaân (en arabe)
Joseph Massad : articles dans le journal Middle East Eye, en particulier l’article du 9 janvier 2023 sur « Les mythes bibliques servant à justifier la conquête de la Palestine ».
Edward Saïd : La Question de Palestine (1979)
AJAJ El Mukhtar dans El Khabar du 04 février 2023, (édition en arabe)
Khaz’al al-Majidi : article en arabe sur le site El Hiwar el Moutamadan
Le site en arabe : https://www.palquest.org/ar/highlights, Principales étapes de la cause palestinienne en arabe)
Emile Thomas, The Roots of the Palestinian Cause, Dar Salah al-Din Publications, Jérusalem, 1976, cité par Adel Samara dans ses articles
Film documentaire « D’où sont-ils venus ? » de Abdelkrim BABA-AÏSSA, en particulier les témoignages de témoins de la Nakba et l’archive d’une longue interview de Moshé Dayan, 1er Chef d’Etat-Major de l’entité sioniste
Liminaire
Falesttineفلسطين : nom arabe donné (vers 1300 av. J-C) par les Philistins à l’ancienne Kanaan.
De 1516 à 1916, sous l’occupation turc-ottomane, le monde arabe (à l’exception du Maroc) représente alors près de 40 % de l’empire ottoman.
A la fin de la Première Guerre mondiale, en 1918, la Palestine est majoritairement arabophone et musulmane. D’autres minorités religieuses et/ou culturelles (druze, chrétienne et juive) y habitaient, mais aucune n’aspirait à devenir une minorité nationale.
Elle compte alors environ 700 000 habitants dont 56 000 juifs (en majorité non autochtones).
La chronologie permet de repérer 4 périodes de références de l’érection et la consolidation de l’entité sioniste comme base militaire, économique et culturelle du collectif impérialiste occidental dans le monde arabe :
1/ 1900-1942 : L’Angleterre et la France coloniales à la manœuvre pour l’érection d’un Etat pour les colons sionistes
2/ 1942-1948 : Les USA, comme puissance impérialiste hégémonique, entrent en scène et deviennent le principal sponsor de la colonisation sioniste
3/ Le collectif impérialiste occidental en soutien actif à l’entité sioniste dans toutes les guerres arabo- sioniste (notamment celles de 1948, 1956, 1967, 1973)
4/ Les guerres impérialistes de destruction des Etats nationaux en capacité potentielle de résister et de concurrencer l’entité sioniste fans la région
5/ La sécurisation de l’entité sioniste par la « normalisation » des régimes réactionnaires arabes
1/1900-1942 : L’Angleterre et la France coloniales à la manœuvre pour l’érection d’un Etat pour les colons sionistes
En 1901 est créé le Fonds national juif pour acquérir des terres en Palestine et y installer des colons juifs au moyen d’une collecte soutenue auprès de riches donateurs (juifs et non juifs, anglo-saxons notamment).
Le bilan des terres achetées reste malgré maigre en raison en raison de la résistance des cultivateurs et propriétaires palestiniens.
Les aspirations religieuses et culturelles des juifs, vont être d’autant plus efficacement instrumentalisées par les dirigeants britanniques et français que le contexte de la fin de la première guerre impérialiste mondiale est celui du mouvement ascendant du colonialisme pour poursuivre l’expansion du marché capitaliste.
En 1905, le mouvement sioniste (dans lequel les juifs sionistes russes sont majoritaires) décide, en convergence avec les visées coloniales britanniques et française, que la Palestine sera le lieu d’établissement des juifs, après avoir écarté plusieurs hypothèses, dont celles de l’Argentine, de Chypre, de l’Ouganda, ainsi que la proposition du gouvernement soviétique (en mars 1928) de fonder une « région autonome juive » à l’Est de la Russie, sous le nom de Birobidjan.
En 1907, la commission d’enquête de parlementaires britanniques (sous le mandat du 1er Ministre Bannerman) écrivait déjà à propos du monde arabe :
« Le danger réside dans le bassin méditerranéen, charnière entre l’Occident et l’Orient, et route de la Grande-Bretagne vers ses colonies d’Extrême-Orient, route qui passe par le canal de Suez. En effet, de Rabat au Maroc jusqu’à Mersin en Turquie, il n’y a qu’un seul peuple jouissant d’une histoire commune, d’une civilisation commune, d’une langue commune, le peuple arabe. Là se trouvent les possibilités d’une éventuelle renaissance nationale, et les ressources d’une probable puissance. »
1916 : La Palestine dans le partage impérialiste de l’empire ottoman
Les puissances impérialistes britanniques et françaises, en concertation avec les dirigeants de la Russie tsariste, organisent le partage impérialiste de l’empire ottoman pratiquement défait. Le partage est consigné dans les Accords dits de Sykes-Picot (noms respectifs des ministres des affaires étrangères anglais et français). Il en ressort deux grands ensembles :
1/ pour la France : Mont Liban, Nord de la Syrie et une partie de l’Anatolie ;
2/ pour l’Angleterre : la Mésopotamie (une partie de la Syrie et de l’Irak actuels, la péninsule arabo-persique), et la Transjordanie (qui deviendra plus tard la Jordanie en 1949).
3/ La Palestine est placée sous mandat britannique (article 4 des accords)
Les accords seront entérinés officiellement en 1920 lors de la conférence de la Société des Nations (ancêtre de l’ONU) à San Remo (Italie).
Le mandat colonial britannique est en réalité une administration civile, et surtout militaire, de soutien à l’Agence juive prévue par les mêmes accords (article 4) en tant qu’organisation officielle pour gérer tout ce qui concerne la population juive. C’est d’ailleurs un éminent sioniste britannique, Sir Herbert Samuel, qui sera nommé en 1920 Haut Commissaire en Palestine.
Pour les dirigeants impérialistes anglais et français, un État colonial juif en Palestine apparaît comme le moyen stratégique pour asseoir leur domination du monde arabe et sécuriser l’accès aux richesses de la région.
Theodor Herzl, auteur du programme de Bâle adopté lors du 1er congrès sioniste en août 1897, avait bien anticipé la stratégie des impérialistes anglais et français dans la région quand il a écrit : « Pour l’Europe, nous constituerons en Palestine un morceau du rempart contre l’Asie. Nous serions la sentinelle avancée de la civilisation contre la barbarie. »
Le 4 juin 1917 (6 mois avant la déclaration Balfour), le « Secrétaire Général des Affaires Étrangères » français, Jules Cambon, adresse une lettre au dirigeant sioniste Noam Sokolov dans laquelle il répond à son projet de « développer la colonisation juive en Palestine ». Il écrit notamment : « Le Gouvernement français, qui est entré dans cette guerre actuelle pour défendre un peuple injustement attaqué, et qui continue à lutter pour affirmer le triomphe du droit sur la force, ne peut que ressentir de la sympathie pour votre cause, dont la victoire est liée à celle des Alliés. Je suis heureux de vous donner ci-joint une telle assurance. »
Le 2 novembre 1917, le ministre britannique des affaires étrangères, Arthur Balfour, en concertation avec les pays alliés durant la 1ière Guerre mondiale, rédige une lettre, appelée Déclaration Balfour, dans laquelle « Le gouvernement de Sa Majesté envisage favorablement l’établissement en Palestine d’un foyer national pour le peuple juif, et emploiera tous ses efforts pour faciliter la réalisation de cet objectif , étant entendu clairement que rien ne sera fait qui puisse porter atteinte ni aux droits civils et religieux des collectivités non juives existant en Palestine, ni aux droits et au statut politique dont les juifs jouissent dans tout autre pays. »
La lettre est adressée à l’homme d’affaires fortuné, dirigeant sioniste juif, Lord Lionel Walter Rothschild, pour la faire connaître au Congrès sioniste.
Balfour écrira dans ses mémoires en 1922 (5 ans après sa déclaration):
« Nous n’avions pas l’intention de tenir compte des sentiments des habitants actuels de la Palestine du fait que les quatre grandes puissances sont attachées au sionisme. Que le sionisme soit dans son droit ou non, bon ou mauvais, cela a une importance bien au-delà des souhaits des sept cent mille Arabes qui vivent actuellement en Palestine. »
De 1919 à 1936, les Britanniques facilitent l’arrivée et l’installation de colons juifs en Palestine
D’importantes vagues de colons vont déferler en Palestine : 35.000 entre 1919 et 1923, 82.000 entre 1924 et 1931 et 217.000 entre 1932 et 1938.
En mai 1933 : Nazis et dirigeants sionistes collaborent pour transférer d’importants capitaux juifs vers la Palestine avec la signature de l’accord dit de la Haavara (transfert) : les nazis au pouvoir en Allemagne, approuve l’accord entre les compagnies d’assurances allemandes et juives et le pouvoir nazi pour organiser l’émigration des juifs allemands (fortunés) et le transfert de leurs capitaux vers la Palestine.
Théodore Herzl avait déjà écrit : « Les antisémites seront nos alliés les plus sûrs et les pays antisémites nos alliés. »
Dans le même temps, l’administration coloniale britannique dénie toute identité nationale aux Palestiniens : tout au plus leur reconnaissait-elle une identité religieuse et culturelle.
1936-1937 : la commission Lord Robert Peel comme premier plan britannique pour doter les colons sionistes d’un Etat.
Cette commission est constituée à la fin de contenir la Grande Révolte de 1936-1939, et venir en aide aux colons sionistes.
Le rapport de la commission (présenté en juillet 1937) préconisait de partager la Palestine en deux États : un État pour les juifs (ce qui n’était pas alors revendiqué en tant que tel par les sionistes, il s’agissait jusque-là d’un foyer) en leur octroyant 20 % de la Palestine et un État pour les arabes sur le reste.
C’est lors de cette Grande Révolte palestinienne de 1936 à 1939 que l’administration coloniale britannique promulgue la loi, dite loi spéciale, portant autorisation de la détention administrative. Cette loi (à peine actualisée dans son fonds) est toujours en vigueur en Palestine occupée.
2/ 1942-1948 : Les USA, comme puissance impérialiste hégémonique, entrent en scène et deviennent le principal sponsor de la colonisation sioniste
En pleine 2ième Guerre mondiale, les dirigeants sionistes anticipent la victoire des Alliés et l’émergence de la puissance états-unienne.
Début mai 1942 : le programme dit de Biltmore (New York) est adopté par le congrès sioniste (co-présidé par Ben Gourion), avec comme principales décisions :
- Une formulation officielle (pour la 1ière première fois) de la demande d’un État juif en Palestine (abandon de la formule foyer national juif) et de sa reconnaissance internationale
- La décision de la formation d’une force militaire sioniste aux côtés des Alliés, sous tutelle des États-Unis
- Le transfert du centre de l’activité sioniste internationale aux États-Unis, pour unealliance renforcée avec ce pays : le projet colonial sioniste et les visées états-uniennes de contrôle militaire et économique des richesses de la région du monde arabe constitueront désormais un seul et même objectif.
Deux déclarations des deux premiers dirigeants du mouvement sioniste expriment clairement le rôle du futur Etat sioniste comme base avancée de l’impérialisme occidental :
- David Ben Gourion déclare en 1945 (dans un entretien avec Richard Crossman, écrivain et homme politique travailliste britannique) : « Si les Britanniques sont d’accord pour l’établissement d’un État Juif dans une partie de la Palestine, nous sommes prêts à leur donner une base contre la Russie. »
- Nahum Goldman (président du Congrès sioniste) déclare le 24 octobre 1945 :
« Les sionistes s’engagent à donner tous les droits aux Britanniques pour établir des bases militaires maritime et aérienne en Palestine en échange de leur accord pour un État Juif sur 65 % des terres palestiniennes, et nous proposerons l’établissement de bases états-uniennes. »
1945 (février) : Signature d’un accord (secret, sur le croiseur USS Quincy) avec les dirigeants saoudiens : l’accord prévoit la protection du régime royal saoudien (avec l’érection d’une base militaire dans le royaume) en échange de l’accès au pétrole saoudien ; les dirigeants saoudiens pour leur part ne s’opposant à pas l’érection d’un État pour les juifs.
Les Etats-Unis se placent de façon stratégique dans la région vont devenir le principal sponsor de l’entité sioniste.
1947 (29 novembre), les puissances impérialistes, à leur tête les Etats-Unis (présidés alors par Truman), décident de doter les juifs d’un État par le vote d’une résolution de l’ONU (n° 181). Le vote de la résolution a nécessité 2 tours : au 1er tour, il manquait une voix pour atteindre le quorum des 2/3 ; au 2e tour, après pressions et corruptions des USA (sur les Philippines, Haïti et le Libéria), la résolution est adoptée par 33 voix pour, dont celle de l’URSS, 13 voix contre (dont celles des pays arabes), et 10 abstentions (dont celles de la Chine, de la Yougoslavie et des pays d’Amérique du Sud).
C’est le plan de partage de la Palestine de 1947 en :
- Un État arabe : 12 000 km², 735 000 habitants, (dont 10.000 juifs, soit moins de 1,5 % de la population)
- Un État pour les juifs : 14 200 km², 905 000 habitants (dont 507 000 arabes, soit plus de 55 % de la population)
- Une zone internationale, Al Qods : 205 000 habitants (dont 100 000 juifs)
Alors que les juifs ne représentaient alors que 35 % de la population totale vivant sur le territoire de la Palestine historique, et ne possédaient que 6 % des terres, l’entité sioniste se voient attribuer 55 % des terres.
En quittant la Palestine, le 14 mai 1948, les Britanniques ont déjà placé les sionistes aux postes de commande du pouvoir administratif (mairies, cadastre, police, justice…).
Cette reconnaissance internationale impulsée par les puissances impérialistes va autoriser les sionistes à ne pas se contenter de cette avancée : ils vont déployer le plan dit plan Dalet en menant des actions terroristes pour expulser les Palestiniens de plusieurs villes et à s’accaparer d’autres parties de la Palestine historique.
Plus de 72 massacres seront perpétrés par les unités terroristes (Stern, Irgoun, Haganah…), dont celui de Deir Yassine (9 avril 1948).
Note : La phrase :« Et quand le Seigneur apparut à Abraham, il lui accorda la terre sainte du Nil à l’Euphrate » figure encoreaujourd’hui en guise de frontispice de la Knesset (mise en place le 14 février 1949)
3/ Le collectif impérialiste occidental en soutien actif à l’entité sioniste dans les 4 principales guerres arabo- sioniste (1948, 1956, 1967, 1973)
1948-1949 (mai – juillet) : 1ière guerre arabo-sioniste
A la suite de leur refus du plan de partage, les armées des États arabes (Egypte, Syrie, Irak, Transjordanie et des volontaires libanais) entrent en Palestine (le 15 mai) en soutien aux Palestiniens déjà entrés en guerre contre les activités terroristes (assassinats, expulsion et accaparement des terres) des groupes terroristes (la Haganah sioniste fondé en 1920, groupe qui deviendra officiellement en mai 1948 l’armée de l’entité sioniste, et l’Irgoun qui en est issu).
Les colons sionistes sont appuyés par des mercenaires occidentaux, appelés « michalinks » ou volontaires (juifs et non juifs), évalués à plus de 3.500, provenant principalement des USA, de Grande Bretagne, du Canada, des colonies d’Afrique du Sud et d’Afrique du Nord.
Voir articles sur les volontaires de l’indépendance d’Israël de l’association MACHAL, du Dr. Fenton, cités par Adel Samara.
C’est au sein de l’armée britannique (entre 1937 et 1940) que l’expérience professionnelle et les armes de la future armée sioniste ont été acquises.
D’importants effectifs de juifs sionistes avaient été intégrés aux forces britanniques comme supplétifs puis comme unités constituées ou dans des escadrons mixtes pour mener des raids de nuit contre des villageois palestiniens, aux côtés de de la Haganah et l’Irgoun.
Cf. la longue interview de Moshé Dayan, 1er chef d’Etat-Major de l’armée sioniste, dans le film documentaire « D’où sont-ils venus ? » de Abdelkrim BABA-AÏSSA
Bilan : Près de 200 villages sont attaqués, 200 habitants palestiniens tués, blessés ou expulsés, exode massif des rescapés : 900 000 Palestiniens sont expulsés.
Les forces sionistes s’assurent la victoire et conquièrent 78 % de l’ancienne Palestine mandataire (50 % de plus que ce que leur accordait le plan de partage).
C’est la NAKBA (la catastrophe) de 1948
Cf. le nouvel historien sioniste Benny Morris cité par Adel Samara
1956 (29 octobre) : 2ième guerre arabo-sioniste
Dès 1955, le gouvernement français apporte une aide substantielle au développement du programme nucléaire de l’entité sioniste en en vue de la construction d’une centrale nucléaire (à Dimona, au sud de la Palestine).
L’entité sioniste sera approvisionnée en uranium enrichi par les États-Unis et l’Afrique du Sud.
Plus tard, l’Allemagne fournira des sous-marins lanceurs de missiles nucléaires.
En réponse à la nationalisation (le 26 juillet 1956) du canal de Suez par le Président égyptien, Gamal Abdel Nasser, l’Angleterre, la France et l’entité sioniste s’allient pour agresser l’Égypte.
L’URSS intervient en soutien à l’Egypte et met fin à l’agression.
L’armée sioniste commet le massacre de Kafr Kassem (village de El Jalil, Galilée) pour prévenir tout soulèvement palestinien de soutien à l’Égypte.
Moshe Dayan, en avril 1956 en tant que ministre « israélien » de la Défense :
« Qui sommes-nous pour vouloir nous opposer à leur haine ? Depuis huit ans, ils sont dans leurs camps de réfugiés à Gaza et, devant leurs yeux, nous transformons en patrie pour nous, la terre et les villages sur lesquels leurs ancêtres ont vécu. Nous sommes une génération de colons et, sans casques d’acier et sans canons, nous ne pouvons planter un arbre et bâtir un foyer. Ne reculons pas quand nous voyons la haine fermenter et remplir les existences des centaines de milliers d’Arabes qui nous entourent. Ne détournons pas le regard, de sorte que notre main ne glissera pas. Tel est le sort de notre génération, le choix de notre existence – être préparés et armés, forts et brutaux – ou, autrement, l’épée glissera de notre poing et notre vie sera anéantie. »
1967 (5-10 juin) : 3e guerre arabo-sioniste
Les services de renseignements sionistes sont largement informés sur l’état de (l’im)préparation à la guerre qui sera déclenchée en juin 1967 : le roi du Maroc, Hassan II, leur a permis d’enregistrer l’intégralité des comptes rendus des délibérations du sommet des pays arabes de Casablanca de 1965.
L’armée sioniste, abondamment fournie en matériel de pointe et munitions par l’OTAN attaque l’Égypte, la Syrie et la Jordanie et occupe le Sinaï, le Golan syrien, la bande de Ghazza et la Cisjordanie dont Jérusalem-Est.
Environ 350 000 Palestiniens sont expulsés. La colonisation de la Cisjordanie et de Jérusalem-Est est lancée aussitôt.
Le 22 novembre 1967, leConseil de sécurité de l’ONU adopte la Résolution n° 242 qui demande notamment le retrait des territoires occupés. L’URSS, le camp socialiste, les partis communistes arabes soutiennent la résolution. Mais, grâce aux vétos des USA notamment, l’entité sioniste ne restituera jamais les territoires, jusqu’à aujourd’hui.
C’est la NAKSA(la grande défaite).
En même temps, une nouvelle phase de la résistance palestinienne, armée et politique, va s’ouvrir et s’organiser en véritable mouvement de libération nationale.
1973 (6-27 octobre) : 4e guerre arabo-sioniste
Les armées égyptienne et syrienne, aidées par les armées de plusieurs pays arabes, pénètrent dans le Sinaï et le Golan occupés pour les récupérer. Elles prennent un avantage réel en franchissant la ligne sioniste Bar Lev, chaîne de fortifications sioniste dans le Sinaï.
Les pays arabes producteurs de pétrole décident d’un embargo pétrolier (17-21 octobre 1973) contre les pays qui soutiennent l’occupant sioniste : ils réduisent la production et l’exportation jusqu’à ce que « les terres arabes occupées par Israël en 1967 [soient] libérées et [que] le peuple palestinien retrouve ses droits ».
Un Front du refus et de la fermeté est constitué par la Syrie, la Libye, l’Irak, le Yémen et l’Algérie.
Les États-Unis organisent un véritable pont aérien, renversent le rapport des forces sur le terrain, sauvent l’entité sioniste et lui permettent de conserver le Sinaï et le Golan.
Les pays arabes de la région vont abandonner la lutte armée pour la récupération de leurs territoires et de la Palestine, et entamer des « normalisations » avec l’entité sioniste.
4/ Les guerres impérialistes de destruction des Etats nationaux en capacité potentielle de résister et de concurrencer l’entité sioniste fans la région
L’objectif du capitalisme-impérialisme est de faire de l’entité sioniste l’État le plus fort dans la région sur les plans militaire, économique, culturel, afin de perpétuer sa domination.
Durant trois décennies, le collectif impérialiste occidental, USA en tête, va s’employer à casser les États des pays du nationaux arabes potentiellement résistants et concurrents de l’entité sioniste.
1991 : agression contre l’Irak, suivie en 2003 de l’invasion avec le projet de partition du pays en entités ethnico-religieuses (Kurdistan irakien, Irak chiite et Irak sunnite)
2011 : agression de la Libye avec le projet d’une partition tribalo-géographique du pays, projet toujours en cours.
2015 : guerre contre le Yémen menée par une coalition des monarchies du Golfe et soutenue par les impérialistes occidentaux
2017 : agression de la Syrie par une coalition impérialiste occidentale pour démembrer le pays (État islamique de Daesh, État kurde, État alaouite et sunnite)
Début 2021, le Pentagone états-unien décide d’inclure l’entité sioniste dans son commandement militaire au Moyen-Orient (y compris l’Afrique du Nord dans la terminologie du Pentagone), aux côtés des monarchies arabes.
L’objectif : un renforcement de la coordination avec les États-Unis (déjà existante sur le terrain), et les monarchies arabes pour étouffer le mouvement de libération nationale palestinien et la résistance des peuples arabes.
Voir Jonathan Cook, article du 02 février 2021 sur le site Arrêt sur Info
5/ La sécurisation de l’entité sioniste par la « normalisation » des régimes réactionnaires arabes
Des pays arabes et non arabes ont entamé la « normalisation » de leurs relations avec l’entité sioniste. En réalité, tous ces accords sont obtenus et écrits sous la dictée de « l’Occident impérialiste », sponsor de l’entité sioniste. La vague des « normalisations » vise à consolider et rendre irréversible le rôle de l’entité sioniste comme centre de contrôle militaire et économique de la région ainsi que le libre déploiement des projets économiques impérialo-sionistes.
La « normalisation » التطبيع est un marchandage, faussement appelée négociation, pour faire exister et faire accepter l’Etat colonial sioniste, accepter l’expulsion du peuple palestinien, accepter le libre déploiement des projets impérialo-sionistes (militaires et économiques), en échange d’un soutien économique et financier et d’une protection des pouvoirs compradores en place contre les résistances de leurs peuples.
- La « normalisation » concrétise la convergence des intérêts de classe des États concernés avec ceux de « l’Occident impérialiste », lesquels intérêts ne peuvent être défendus qu’en alliance avec lui.
- Elle reflète l’intériorisation par les États arabes et la bourgeoisie palestinienne de la défaite, la capitulation et son ancrage dans le camp de la contre-révolution.
- La « normalisation » a aussi une visée économique : intégrer les pays « normalisés » dans la zone de profit du capital impérialo-sioniste. Cette protection impérialiste rassure les investisseurs privés et étatiques qui vont affluer vers ces États « normalisateurs » et surtout vers l’entité sioniste. L’évolution de l’investissement étranger au sein de l’entité sioniste après ces accords montre qu’elle en est le principal bénéficiaire.
Historique rapide des « normalisations »
1978 : les accords de Camp David, qui seront suivis en 1979 d’un traité de paix entre l’entité sioniste et l’Égypte, actent la neutralisation du pays arabe le plus peuplé et, potentiellement, grand réservoir de résistance anti-sioniste.
1993 : Accords d’Oslo (suite de la Conférence de Madrid de 1991) ou paix du et pour le capital avec la collaboration de la bourgeoisie palestinienne. Si l’accord prévoit, formellement, la reconnaissance de l’État d’Israël et l’acceptation de l’OLP, l’« Autorité Palestinienne » créée a pour mission principale le maintien de l’ordre au profit de l’entité sioniste et la redistribution de l’aide internationale.
1994 (avril), le Protocole de Paris complète ces accords en érigeant l’entité sioniste en douane pour les échanges commerciaux.
1994 (26 octobre) : Accords de Wadi Araba (ville frontière de Jordanie), équivalant à un traité de paix entre « Israël » et la Jordanie.
2001 (24 septembre) : Accords de Taba en Egypte (dits Oslo 2) sur la Cisjordanie.
2002 : « Initiative arabe de paix » proposée par l’Arabie Saoudite lors du sommet de la Ligue arabe pour la création d’un État palestinien démilitarisé sur certaines parties de la Cisjordanie et de Gaza, la révocation du droit au retour des réfugiés et de leurs droits résultant de leur déplacement, et la recherche de lieux pour abriter les réfugiés en les installant dans leur lieu de résidence ou dans un pays tiers ou avec un retour limité à ceux qui sont disponibles
2020 (fin janvier) : Accords d’Abraham dit « Accord du siècle », à Washington, portant « normalisation » des Émirats arabes unis, de Bahreïn et du Soudan (accords parrainés par le président des Etats-Unis, D. Trump et non annulés depuis).
Officiellement, l’accord (le dernier en date) prévoit :
- Un « État » palestinien sans aucune frontière avec un État arabe (sauf avec l’Egypte « normalisée » via Gaza), en forme d’archipel d’ilots sans continuité, donc avec des entrées-sorties du territoire contrôlées par l’entité sioniste. Un « État » démilitarisé et sans aucun contrôle sur l’espace aérien. Les États-Unis financeront routes, ponts et tunnels pour relier les « morceaux » palestiniens et « faciliter la liberté de circulation des Palestiniens ».
- L’Etat sioniste annexera les territoires considérés comme non occupés mais saisis lors des guerres « défensives » de l’entité sioniste, à savoir la vallée du Jourdain et les colonies, soit environ 15 % de la partie continue et très fertile de la Cisjordanie.
- Al-Qods est reconnue comme capitale indivisible de « l’État sioniste » consacré comme « État-nation du peuple juif ». Un État donc « suprémaciste » au service du capitalisme mondialisé. En conséquence de quoi, il serait en droit de procéder au transfert-expulsion des non juifs, soit plus de 405 555 Palestiniens résidant sur le territoire déjà conquis.
- La libération de près de 5 000 prisonniers palestiniens sera conditionnelle à la signature de leur engagement à respecter et à promouvoir la coexistence entre « Israéliens » et Palestiniens.
- Enfin, et ce n’est pas le moins important, le « règlement de la question palestinienne » ne doit plus être une condition des « normalisations israélo-arabes ».
2020 (22 décembre) : « Normalisation » du Maroc en échange de la reconnaissance de la marocanité du Sahara occidental par les États-Unis.
Il faut ajouter que l’entrée en application de l’accord a donné à voir les clauses secrètes qui révèlent la nature militariste et expansionniste de l’entité sioniste et sa liaison organique avec l’impérialisme : parmi les premières actions, figurent l’établissement de bases militaires sionistes au Maroc, la livraison-vente d’armes (dont des drones de dernière génération), la formation de cadres dirigeants de l’armée royale. L’entité sioniste peut donc entrer directement en confrontation avec l’Algérie, dernier rescapé du « Front du refus et de la fermeté ».
Il ressort que sans l’aide militaire, financière, économique, culturelle, politique et diplomatique de « l’Occident » impérialiste et sans la collaboration active des régimes réactionnaires arabes, le regroupement des juifs de plusieurs nationalités (européennes notamment) et la colonisation sioniste n’aurait pas pu être lancée, progresser aussi rapidement et durer encore.
Georges Ibrahim Abdallah le synthétise bien dans sa déclaration du 27 juin 2001 : « L’entité sioniste n’est pas simplement un instrument parmi tant d’autres au service de l’impérialisme pour le pillage et la domination de la région. Elle est en fait un prolongement organique de l’impérialisme occidental. ».