Luttes des travailleurs

Echos des luttes travailleurs Bulletin N°15

Le nouveau projet de Code du travail prévoit des restrictions
Droit de grève : ce qui va changer

Par : Said SMATI


Le nouveau code du travail est finalement dévoilé. Le projet de loi élaboré par le département du Travail, de l’Emploi et de la Sécurité sociale risque de provoquer un bras de fer, notamment concernant le droit de grève.
Dans la loi soumise à débat, “le droit de grève” n’est pas clairement remis en cause, mais le législateur a mis des balises qui rendent compliqué l’exercice de ce droit. Dans le volet obligations des travailleurs, outre celles déjà prévues par la législation en vigueur, l’accent est particulièrement mis, dans le texte, sur l’exercice du droit de grève qui devient de plus en plus canalisé. Ainsi, il sera désormais fait obligation aux travailleurs observant un mouvement de grève d’assurer le service minimum, de se soumettre à toute réquisition des autorités compétentes, de ne pas entraver la liberté de travail (qui sera considérée comme une faute professionnelle grave). Selon le nouveau projet, les travailleurs sont désormais soumis “à l’obligation de se soumettre à la réquisition des autorités compétentes” en cas de grève. Selon l’article 352, le refus d’exécuter un ordre de réquisition constitue une faute professionnelle grave. Les rédacteurs du document ajoutent un nouveau concept qui peut prêter à confusion, à savoir “le droit au travail”. Selon l’article 344, l’entrave à la liberté de travail est punie par la loi. Dans l’article qui suit, soit le 345, il est dit que “l’occupation par des travailleurs en grève de locaux professionnels de l’employeur est interdite quand elle a pour objet de constituer une entrave à la liberté du travail”. Est-ce à dire que le piquet de grève est interdit sur le lieu du travail ? Cette “entrave à la liberté du travail” fait partie des motifs justifiant le licenciement.
Le nouveau texte élargit également le champ d’application des domaines touchés par “le service minimum”. Ainsi, les enseignants “qui dispensent des programmes pédagogiques des examens à caractère national” sont touchés par l’obligation d’observer le service minimum (article 348). Le refus par un travailleur concerné d’assurer le service minimum auquel il est astreint constitue une faute professionnelle grave.
Par ailleurs, il est clairement stipulé que durant les journées de grève, le salarié “n’a pas droit à une rémunération”. Un article susceptible de dissuader les salariés qui auront recours à la grève. À signaler aussi l’article 353 qui précise les domaines d’activité où le recours à la grève est interdit, à l’instar des agents actifs des douanes.
Les entraves aux libertés syndicales ont de tout temps été dénoncées par les syndicalistes. Les dispositions contenues dans le nouveau projet de loi de code du travail risquent encore d’exacerber les tentions entre les syndicats et les pouvoirs publiques.
S. S.

Code du travail : fini le statut de travailleur permanent



Le nouveau Code du travail, qui devra être bientôt présenté au Parlement, généralise le contrat à durée déterminée et consacre par la même la précarité de l’emploi. Présenté il y a quelques mois comme un «texte» qui révolutionnerait le monde du travail, ce nouveau code, dont nous détenons une copie, va plutôt bouleverser le marché de l’emploi et, surtout, hypothéquer tous les acquis durement arrachés par les travailleurs. Vague, plein d’incohérences et sans grande consistance juridique, ce nouveau texte de loi lève toute protection au salarié qu’il laisse à la merci de son employeur. Ainsi, dans son article 26, il généralise de manière outrancière le contrat à durée déterminée (CDD). Pis encore, l’employé n’aura droit qu’à trois renouvellements successifs de son contrat. Et, manque de clarté, son sort au bout de son troisième contrat n’est nullement défini. Le contrat à durée indéterminée (CDI) ne sera valable que pour le travail à temps partiel, tel que souligné dans l’article 28. Ces modifications ont été faites au nom de la flexibilité de l’emploi longtemps réclamée par les patrons et refusée par les syndicats. Le gouvernement semble ainsi céder en faveur des patrons dont certains ont chichement financé la campagne du président Bouteflika pour le 4e mandat. D’ailleurs, il n’y a aucun mot sur le travail permanent dans le nouveau code. Ce code ne se limite pas à cela. Il évacue toute possibilité d’intégration d’un travailleur abusivement licencié, même s’il y a décision de justice. Il ne prévoit que des indemnisations financières. Autre aberration de ce texte de loi, la remise en cause du droit de grève constitutionnellement garanti et consacré. Dans son article 338, il affirme que la durée de grève ne peut ni être prolongée ni faire l’objet d’un gel ou d’une reconduction. Autrement dit, le syndicat ne peut nullement utiliser le droit de grève comme arme de pression sur l’employeur. Pour reprendre sa grève, il doit impérativement suivre la procédure habituelle avec un préavis de grève. Toujours dans le même registre, le syndicat doit spécifier, tel qu’exigé dans l’article 339, le motif, la date, le lieu et l’effectif concerné par la grève. Aussi, le nouveau Code du travail ne contient aucune disposition interdisant le travail des enfants. L’article 48 interdit uniquement le travail susceptible de porter atteinte à l’intégrité physique et morale de l’enfant. Autre point qui risque de soulever la colère des syndicats, c’est le caractère consultatif des membres de droit du conseil d’administration d’une entreprise, consacré dans l’article 167. Cet article est en contradiction avec le Code du commerce qui considère les membres du CA comme responsables civilement et pénalement. Le nouveau code contient également de nouvelles dispositions relatives au Conseil de participation. Ainsi, selon l’article 174, le mandat du délégué syndical est de fait suspendu s’il est élu membre du CP. Une forme d’abus en sens que le mandat du syndicat ne peut être annulé ni suspendu que par l’AG ou le conseil syndical.
Rafik Meddour

Nouveau code du travail : Syndicats autonomes et UGTA sur la même longueur d’onde

par Abdelkrim Zerzouri


C’est peut-être une première dans les annales des luttes syndicales, l’avant-projet portant nouveau code du travail réveille un sentiment de «survie» chez les syndicalistes de tous bords. Tous les syndicats y vont, en effet, en rangs serrés, unanimes pour dénoncer les dérives d’une loi qui conduirait, si on venait à l’adopter définitivement, tout droit vers une grave précarisation de l’emploi et la consécration de l’abus en tant que règle de gestion. Les syndicats autonomes, peut-il en être autrement, s’impliquent dans le débat autour des articles du nouveau code de travail, et joignent leurs voix aux craintes exprimées au sein de l’UGTA. Le droit syndical ou l’activité syndicale en elle-même figure au premier plan des préoccupations du Snapap. Consulté à propos du nouveau code de travail, pour apporter sa contribution et surtout ses ultimes propositions visant l’enrichissement de l’avant-projet, le Snapap a remis ses notes au ministre du Travail, nous dira M. Layachi Belmili, le chargé de l’organique. Ce dernier laissera entendre que le recadrage de la loi sur le volet de la représentativité syndicale doit être profondément révisé. «Pour le moment, la loi exige 20% d’adhésion des travailleurs pour reconnaître une représentativité syndicale sur un lieu de travail, et l’on laisse malheureusement toute la latitude aux employeurs, admis comme juge et partie, pour évaluer et reconnaître cette adhésion ?! On a proposé que cette appréciation soit laissée, impérativement, à d’autres instances, comme par exemple aux inspecteurs du travail, dont la mission de veiller sur l’application des lois serait aussi profondément redynamisée dans cette nouvelle loi en gestation », indiquera notre interlocuteur. Ajoutant dans ce contexte qu’il faut lever l’amalgame du syndicat représentatif, c’est-à-dire qui a les 20 % d’adhésion, mais qui se trouve exclu des grandes décisions, là où l’on tord le cou à la loi et l’on se réfère au syndicat «le plus» représentatif, lorsqu’il s’agit de désigner des membres du comité paritaire ou de gérer les œuvres sociales. «Dans ces cas de figure, il faudrait recourir à la désignation de représentants des travailleurs au sein des commissions en question sans focaliser sur leur adhésion syndicale, car même un travailleur qui n’appartient à aucune chapelle syndicale, a le droit de faire partie de ces commissions qui gèrent les plans de carrière, les commissions de discipline et autres plans sociaux. Et dans ces circonstances, la compétence doit primer sur l’allégeance», soutiendra-t-il. D’autre part, M. Belmili estime que «les discussions autour de l’avant-projet portant nouveau code de travail doivent être élargies à toutes les parties, sans se soucier de leur taille et de leur poids, quiconque peut apporter sa contribution efficace et constructive doit s’impliquer, et doit être sollicité pour cela, ce n’est pas l’apanage de tel syndicat ou un autre». Rien n’a encore filtré sur les réactions de la tutelle autour des propositions du Snapap, mais tout sera plus clair lors d’une rencontre avec M. Mohamed El Ghazi, qui devrait se tenir incessamment, certainement avant la rencontre tripartite prévue, elle, sauf changement de dernière minute, avant la fin du mois en cours. «On espère que nos propositions soient prises en considération, que toutes les propositions émises par d’autres parties soient aussi étudiées, car on ne veut pas avoir un nouveau code et qu’on ira tout de suite après revendiquer sa révision», dira notre interlocuteur.
De son côté, M. Larbi Nouar, le coordinateur national du Cnapest, recommandera «d’amplifier largement le débat». N’ayant pas été invité à apporter sa contribution à ce titre, le Cnapest préconise de «mettre en place des balises contre les exactions et les abus, surtout en matière de contrats de travail à durée déterminée, sinon on aura placé tout court le travailleur algérien en état d’esclavagisme». Le coordinateur du Cnapest ne manquera pas de saluer dans ce sillage les réactions et les positions exprimées par les fédérations affiliées à l’UGTA, qui ont qualifié le nouveau code du travail de «régression sociale». Le Snapest dénonce aussi l’exclusion des partenaires sociaux dans l’élaboration du nouveau code de travail et fait part de ses craintes face aux risques qui pèsent sur le monde du travail à l’ombre des articles du nouveau code du travail. «C’est une vente concomitante, une remise en cause des acquis sociaux, si l’on tient compte des points négatifs contenus dans le code du travail, à l’image de la suppression du CDI remplacé par le CDD», considère M. Meziane Meriane, coordinateur national du Snapest. UGTA et syndicats autonomes sont sur une même longueur d’ondes et tirent ensemble la sonnette d’alarme, «appréhensions d’une remise en cause du droit syndical, qui sera d’ailleurs vidé de sa sève avec ces contrats CDD, autant dire un interdit de se syndiquer indirectement signifié aux travailleurs, articles de lois considérées à l’unanimité «anti-sociales», des consultations pas assez larges, menace sur le droit de grève…». Tant d’objections à un avant-projet de loi que les pouvoirs publics tentent de faire avaliser à la hussarde.

Libertés syndicales, CCD, Travail des enfants
Code du travail : L’UGTA dit “non”

Par : Azzeddine Bensouiah


Les syndicalistes considèrent que le nouveau projet portant sur le code du travail est en recul en termes de droits des travailleurs.
Les fédérations syndicales, affiliées à l’UGTA, s’opposent au projet de code du travail proposé par le gouvernement. Lors d’une rencontre tenue hier à la Maison du peuple, les responsables des fédérations, en l’absence du patron de la Centrale syndicale, ont jugé ce nouveau code liberticide, voire contre-révolutionnaire, dans la mesure où il remet en cause la participation des travailleurs, notamment dans les conseils d’administration où la parole leur serait interdite, selon le projet de code.
L’introduction des CDD est jugée comme un recul consacre la précarité du travail. Les responsables des fédérations UGTA ont estimé que les futurs détenteurs de CDD auront du mal à bénéficier de nombreux avantages, à l’image des crédits à la consommation. Selon eux, les banques hésiteraient à donner des crédits aux détenteurs de contrats de travail à durée limitée. Autre recul relevé par les fédérations : le projet de code du travail mentionne le travail des enfants dans certains
secteurs.
Les fédérations ont présenté leurs propositions et exprimé leur opposition au projet de code tel que présenté et qui contient quelque 660 articles. Trois commissions spécialisées (juristes, universitaires et syndicalistes) ont été mises en place pour décortiquer le projet. Une mouture de synthèse devrait être adoptée prochainement.
Par ailleurs, les fédérations ont débattu de la question de l’abrogation de l’article 87 bis. Pour Achour Felli, l’incidence financière de cette application se situerait autour de 2 400 milliards de dinars. Son application devrait toucher les travailleurs aux bas salaires, ceux situés entre les échelles 1 et 5. Mais, selon lui, tous les travailleurs de la Fonction publique devraient être touchés. Il dira que l’application de cet article induira une augmentation de la masse salariale de l’ordre de 10 à 15%.
Cette réunion, pour rappel, se tient à la veille de la tenue du congrès de l’UGTA où Abdelmadjid Sidi-Saïd s’apprête à briguer un troisième mandat, malgré l’opposition de certains anciens cadres syndicaux, emmenés par Ahmed Badaoui. Ces derniers reprochent au patron de la Centrale syndicale, non seulement la gestion des très convoités fonds sociaux, mais aussi l’argent des cotisations des syndicalistes.
A. B.

L’avant-projet remis en cause : L’UGTA dénonce un code du travail «répressif et régressif»

par Ghania Oukazi


L’UGTA estime que l’avant-projet relatif au code du travail «est répressif, régressif, privilégie les employeurs, légalise le travail des enfants, diminue les syndicalistes et jettent en pâture les travailleurs».

Ce constat, la centrale syndicale le fait par la voix de ses trente fédérations, dont les responsables sont membres de la commission nationale, installée depuis quelques mois par le secrétaire général, aux fins de débattre avec la base des dispositions de cet avant-projet. Ils étaient réunis hier à la Maison du peuple à Alger pour faire le point sur les propositions formulées dans ce cadre. Ouverte par Messous, le secrétaire national chargé de la législation et présidée par Telou, secrétaire national chargé des conflits sociaux, la rencontre était la 5ème du genre et devait, en principe, aboutir à la remise des rapports finaux. Les présidents des trente fédérations décrient plutôt qu’ils ne cautionnent pas le contenu de ce nouveau code du travail que le gouvernement leur a proposé comme document de base pour participer à la révision de celui de 1990.

Le nouveau code du travail, version 2014, constitué de 660 articles, ne ressemble pas beaucoup à la première copie que l’UGTA a eue entre les mains en 2005. Copie que Tayeb Louh, alors ministre du Travail, a préféré mettre sous le coude. Mohamed Ghazi, l’actuel ministre, lui, a sorti la nouvelle version certainement sans trop penser qu’elle risque de mettre le feu aux poudres, jonchant les traverses du monde du travail, tant elle est décriée par leurs représentants syndicaux.

Le président de la Fédération du textile lancera un condensé de critiques négatives qui font de ce code un instrument de répression «légal». Amar Takdjout a tenu à clarifier l’idée du contrat de travail à durée déterminée (CDD) consacré par le gouvernement dans ce nouveau code au nom de la flexibilité de l’emploi. «Ce document élargit le recours au CDD tel que revendiqué par Benmeradi, alors ministre du Travail, ce qui est synonyme de la suppression, entre autres, du droit syndical et du crédit à la consommation puisqu’il faut être travailleur permanent pour y prétendre», dit-il. Le nouveau code du travail imprime, selon lui, au monde du travail «une véritable régression sociale». Les syndicalistes remettent alors en cause, tout autant que lui, l’article 26 contenu dans le chapitre II relatif au contrat de travail.

CES CDD QUI PRECARISENT L’EMPLOI

«Les contrats à durée déterminée (…) ne peuvent faire l’objet de trois renouvellements successifs», stipule l’article. Ils proposent carrément sa suppression. Takdjout dénonce dans le document «l’introduction et la consécration du travail des enfants d’une manière sournoise», note-t-il. «Les travailleurs mineurs et les apprentis des deux sexes, âgés de moins de 18 ans, ne peuvent être employés à des travaux susceptibles de porter atteinte à leur intégrité physique, mentale et à leur moralité. La liste des travaux visés ci-dessus est déterminée par voie réglementaire», prévoit l’article 48 qu’il propose de supprimer. «On va aller vers l’exploitation des enfants puisque aucun article dans ce code n’interdit l’emploi des mineurs», pense Takdjout.

L’article 90, inscrit dans la section 2 «de la suspension de la relation de travail», est aussi sujet à contestation. Dans son alinéa 7, le législateur veut, par exemple, que la suspension de la relation de travail «intervient de droit par l’effet de l’exercice du droit de grève dans le cadre de la loi». Il est vite rappelé que le droit de grève est un droit constitutionnel qui ne peut par son exercice provoquer une suspension de la relation de travail. «Les articles relatifs à l’exercice du droit de grève (333, 339), tels que rédigés, suffisent pour faire avorter tout mouvement de grève, ce code est en faveur des employeurs et interdit aux travailleurs le droit à la revendication dans le cadre de la loi», juge le président de la Fédération de la jeunesse et des sports. La Fédération de la formation professionnelle estime, par la voix de son président, que «beaucoup d’articles dans ce code sont répressifs, on a l’impression qu’ils ont été extraits d’un document pénal». Pour lui, l’objectif de leurs initiateurs est «d’aller vers une division totale des travailleurs». Le représentant de la Fédération des retraités reproche, par ailleurs, aux rédacteurs du nouveau code «d’avoir oublié les retraités».

Les fédérations affiliées à l’UGTA sont unanimes à dénoncer le rôle restreint attribué par le législateur de ce code aux syndicalistes qui veulent être membres des organes de participation des entreprises. «C’est une approche dangereuse qui cible le monde du travail», dit un syndicaliste.

«A QUOI ÇA SERT D’AVOIR ABROGE L’ARTICLE 87 BIS ?»

«Ce code montre comment on casse le syndicat en obligeant ses représentants à choisir entre leur mandat de syndicaliste et celui de membre des organes de participation, c’est aberrant !», lance le président de la Fédération des ports. «Si un syndicaliste n’a pas le droit de faire les deux, alors le gouvernement ne peut avoir de ministres militants dans des partis politiques !», ajoute-t-il. Au même titre que beaucoup de syndicalistes, il recommande la suppression des articles 167 et 174. La Fédération des travailleurs de l’électricité et du gaz affirme alors que «ce code est répressif et désavantageux pour le syndicat et les travailleurs». Pour son président, «le seul avantage pour le monde du travail, c’est l’abrogation de l’article 87 bis». Encore qu’il faille ne pas trouver dans cet avant-projet de code du travail une définition du SNMG confortant cet article pourtant abrogé. C’est ce que relève le président de la Fédération des travailleurs du textile en lisant l’article 130 qui stipule : «Le salaire national minimum garanti comprend le salaire de base ainsi que les primes liées à la productivité, au rendement et aux résultats du travail. Les primes et indemnités exclues du contenu du SNMG seront définies par voie réglementaire». Le responsable syndical interroge alors : «Qu’est-ce qui a changé?» En plus, il pense que «la voie réglementaire» est un moyen pour faire traîner les choses. «On la connaît, elle prévoit des textes qui tardent toujours à être adoptés et appliqués», affirme-t-il. Il appelle à la suppression de l’article. Le harcèlement sexuel est aussi, selon les syndicalistes, «cet autre fléau qui continuera de menacer la femme si ce code est adopté tel qu’il est». Ils pensent que «les CDD, de par leur consécration dans ce code, constituent une arme redoutable offerte aux employeurs lorsqu’il est question de harcèlement sexuel».

Le représentant de la Fédération des travailleurs des forêts synthétise les propos de ses «camarades» et souligne, convaincu, que «le code renforce les employeurs, restreint les droits syndicaux, institue l’emploi précaire, fragilise le front social, facilite les procédures de licenciement, encourage l’emploi des enfants et casse les instruments de protection des travailleurs». A ceux qui rappellent la qualité «d’avant-projet du code», les syndicalistes répondent «oui, mais ils montrent bien la vision et les visées du gouvernement».

Pour « charmer les IDE »

par G.O.


Un grand nombre de syndicalistes affiliés à l’UGTA pensent que « l’avant-projet portant code du travail n’est pas fait pour gérer les relations de travail dans l’économie nationale parce que l’Algérie n’a pas d’économie ». Ils affirment que « ce code est fait pour charmer les investisseurs directs étrangers (IDE) qui ne sont toujours pas venus malgré toutes les facilitations et les concessions du gouvernement ». En clair, les syndicalistes craignent que ce document ne serve à appâter les étrangers parce que, expliquent-ils, « plusieurs dispositions consacrent la précarité de l’emploi et en évidence assure une main-d’œuvre bon marché». «Si on légalise le travail des enfants, on permet le licenciement des travailleurs sans trop de difficultés et surtout sans obligation de les réintégrer même si le licenciement est abusif, si on recours le plus possible aux CDD (contrats à durée déterminée), c’est qu’on veut que le prix de la main-d’œuvre nationale baisse considérablement. » Ils dénoncent ainsi le fait que « devant son incapacité à assainir les finances du pays et son économie, à lutter contre la corruption et la bureaucratie, on lâche les travailleurs en leur faisant perdre leurs droits par la force de la loi qui est ce code ».

Abrogation de l’article 87 bis et retraites : L’autre bataille de l’UGTA

Dernière conditionnalité du FMI à tomber, l’article 87 bis qui est abrogé, par la force de la loi de Finances 2015. Les fédérations de l’UGTA qualifient cette décision «d’historique, courageuse, à inscrire dans la longue liste de l’engagement du président de la République, au profit des larges couches des travailleurs.» Le président de la Fédération UGTA, chargé des conflits sociaux, a estimé, hier, l’incidence financière de cette abrogation, à 2.400 milliards de DA. «La révision des salaires se fera, à partir de janvier 2015, secteur par secteur, et concernera toutes les entreprises, tous les travailleurs seront touchés, directement ou indirectement,» a-t-il déclaré. Les premiers à en bénéficier, ce sont, selon lui, les catégories sociales basses, allant de 1 à 7 échelons. C’est, explique-t-il, une incidence financière, sur toutes les grilles de salaires de la Fonction publique et du secteur économique public et privé. Seulement, avant, affirment les syndicalistes, «il faut un décret pour redéfinir le SNMG, ce qui impose une révision des grilles des salaires du secteur économique, ce qui ne peut se faire que sur la base de négociations tripartites.» Des réunions sont annoncées, à cet effet, à partir de janvier prochain. L’on avance qu’un groupe d’experts a évalué l’incidence financière de la suppression du 87 bis, à 300 milliards de DA «rien que pour les employés de la Fonction publique.» Le gouvernement en prévoit, lui, 110 milliards DA. Les syndicalistes estiment que «toutes les sommes avancées sont fausses, gonflées parfois, il faut s’en tenir à cette abrogation et lutter pour définir le SNMG et appliquer sa nouvelle formule, aux salaires, pour que les travailleurs puissent vivre, à peu près, décemment.» Les retraités auront, eux aussi, à en bénéficier, puisque lorsque le FMI avait obligé les autorités algériennes à tasser les salaires par cette formule 87 bis, il avait exigé, en même temps, que le niveau des pensions de retraite soit réduit de 70%. «Ceci est une autre bataille que l’UGTA devra mener pour recouvrir les droits de nos aînés,» soutient un président de fédération.

SUPPRESSION DU FAMEUX 87-BIS
Le satisfecit des fédérations UGTA



La décision prise en Conseil des ministres de supprimer le fameux article 87 bis du code du travail, ce qui devra permettre la redéfinition du salaire national minimum garanti (SNMG), est saluée par les fédérations de l’UGTA. Réunies, hier au siège de la Centrale syndicale pour débattre du projet du nouveau code du travail, les 30 fédérations ont applaudi, à travers une motion spécifique, à la décision du chef de l’Etat.
Sofiane Aït Iflis – Alger (Le Soir) – Le secrétariat national de la Centrale syndicale n’a pas manqué, il faut le dire, l’opportunité de cette réunion de travail associant les représentants des structures verticales de l’organisation pour louer le geste de Bouteflika. Les fédéraux, convoqués pour débattre du projet du nouveau code du travail, se sont vu proposés, dès l’exposé liminaire, d’exprimer leur satisfaction de la suppression annoncée du 87 bis. Une satisfaction somme toute naturelle, tant est que l’abrogation de l’article en question fait partie des points saillants de la revendication syndicale depuis des années. L’abrogation du 87 bis, dont l’incidence financière sera, selon les calculs de l’UGTA, de l’ordre de 2 400 milliards de dinars, pourrait cependant ne pas profiter à l’ensemble des travailleurs. Si, en effet, la redéfinition du SNMG est aisément applicable dans la Fonction publique, il n’en est pas de même pour le secteur économique. D’ailleurs, le secrétaire national à l’UGTA chargé des questions socio-économiques, Telli Achour, qui a présidé la réunion d’hier, a reconnu qu’il y aura assurément des difficultés d’application dans le secteur économique. Selon lui, l’impact de la suppression du 87 bis sera fonction de la situation des entreprises. Des experts économistes prévoient en effet la hausse jusqu’à 15% des masses salariales des entreprises du fait de cette suppression du 87 bis. M. Telli a parlé d’une hausse oscillant entre 5 et 15%. Une situation qui ne sera supportable pour toutes les entreprises. Cela étant, les fédéraux UGTA ont eu, par ailleurs, à s’imprégner des dispositions du projet du nouveau code du travail. Riche de 661 articles, le document devra faire l’objet d’un débat au sein de ces structures de l’UGTA, lesquelles auront à mettre des propositions que le secrétariat national de l’UGTA devra synthétiser. La copie, finalisée en juillet, du ministère du Travail, de l’Emploi et de la Sécurité sociale propose, entre autres dispositions qui ne devraient pas agréer les syndicats, la généralisation du contrat à durée déterminée (CDD). Une disposition, si elle devait être ainsi votée, consacrera, de l’avis de nombreux syndicalistes, la précarité de l’emploi. Il est fort à s’attendre à un bras de fer entre d’un côté les syndicats et de l’autre le patronat et le gouvernement.
S. A. I.

Déclaration-appel du CLA

A propos de l’avant projet du nouveau code du travail
-L’article 87bis n’est pas abrogé
-Consacre la précarisation de l’emploi
-Autorisation des enfants mineurs de 16 ans à travailler
-Le droit de grève remis en cause
-Des sanctions dérisoires pour l’employeur et exagéré sur l’employé
-Le rôle des représentants des travailleurs dans les différents conseils d’administration est à titre consultatifs.
-La consécration de l’UGTA comme seule partenaire sociale.
La prochaine tripartite ou plutôt monopartite qui se tiendra au courant de ce mois de septembre se prépare à adopter le nouveau code du travail qui constitue un recul pour les acquis des travailleurs et une avancé pour les employeurs et la lecture de l’avant projet fait ressortir les remarques suivantes :
1) Les articles 87 et 87 bis relatif a la définition du SNMG et son mode de calcul sont remplacés ²par l’article 129 du nouveau code qui est une copie de l’article 87 par contre le 87bis est remplacé par l’article 130 qui stipule que le SNMG comprends le salaire de base ainsi que les primes lies à la productivité, aux rendement et aux résultat de travail. Encore une fois la victoire criée pour l’abrogation de l’article 87bis n’est que de leurre.
2) La relation de travail est précarisée par le maintien des CDD et CDI comme mode de recrutement et autorise l’employeur à mettre fin aux contrats de travail pour divers raisons sont toutefois assurées les droits du travailleur qui sont devenus dérisoires.
3) Le droit de grève est remis en cause par la complication de la procédure de son déclenchement et l’élargissement du champ d’application de la notion du service minimum où on constate que presque toute activité est concernée.
4) L’article 167 prévoit que le rôle des représentants des travailleurs dans les conseils d’administration et à titre consultatifs, et ils sont soumis à l’obligation du secret professionnels.
5) L’article 241 prévoit une sanction de 5000 à 10000 DA pour les employeurs qui font recours au travail en noir (drôle de sanction).
6) L’UGTA est maintenue comme seule partenaire sociale dans toutes les structures de décisions engageant l’avenir des travailleurs.
Conscient des enjeux du contenu de l’avant projet portant sur le code du travail le CLA :
Interpelle les pouvoirs publiques à retirer ce projet de la honte et à ouvrir un débat transparent avec tous les partenaires sociaux sur son contenu.
Appelle l’ensemble des syndicats a se mobilisé pour lui faire barrage par des actions communes.
Reste mobiliser et adhère à toutes les initiatives allant dans les sens de construction de rapport de force pour renversé le contenu du nouveau code du travail en faveur des travailleurs.
Vive la lutte car seule la lutte paie.
Alger le 07/09/2014

Le secrétaire général


Les syndicats autonomes «encore une fois» ignorés

par M. Mehdi


Agréés, pour certains, depuis plus de 20 ans, les syndicats autonomes n’ont pas été associés à la révision du Code du travail. Ils n’ont pris connaissance de certaines des «nouvelles» dispositions que via les fuites dans la presse. Invités à donner leur avis sur cet avant-projet de loi, les présidents de deux syndicats du secteur de la santé, le SNPSP et le SNPSSP, convergent vers le même constat. «Nous n’avons pas été associés, ni consultés».

Pour Mohamed Yousfi, président du Syndicat national des praticiens spécialistes de la santé publique (SNPSSP), «il n’est pas possible de donner un avis sur un texte qu’on n’a pas consulté et pour lequel nous n’avons pas été officiellement saisis». «Nous sommes complètement exclus des discussions portant révision du Code du travail depuis déjà plus 5 ans», constate Dr. Yousfi pour qui les pouvoirs publics continuent dans leur attitude de «bafouer les lois de la république» notamment en «matière de pluralisme syndical» qui exige des autorités de consulter les «partenaires sociaux». Dr. Yousfi regrette que l’actuel ministre du Travail n’a pas reçu les syndicats autonomes, et que «sur la question de la révision du Code du travail comme sur l’ensemble des questions qui concernent les travailleurs, la centrale UGTA est l’unique interlocuteur des pouvoirs publics». Le président du SNPSSP affirme que lorsque le texte sera présenté devant l’APN «nous donnerons notre position».

Même constat chez le président du Syndicat national des praticiens de la santé publique (SNPSP), Lyes Merabet, qui «dénonce» que les organisations syndicales autonomes «n’aient pas été associées à la révision de ce texte».

Il dit son grand étonnement que la révision d’une réglementation qui concerne les travailleurs «ne prenne pas en compte les avis des acteurs du terrain syndical», pendant que le «discours officiel convoque le «pluralisme syndical» pour la décoration».

«Honnêtement, on ne peut pas discuter de ce texte, vu qu’on ne détient pas une copie. En plus, les autorités vont trouver matière à dire que tout le monde a donné son avis sur ce projet de loi, alors que nous en avons appris les contours que dans la presse», affirme le président du SNPSP. Devant notre insistance, Dr. Merabet affirme que, selon les éléments recueillis dans la presse, cet avant-projet d’amendement du Code du travail est «un grave recul» sur les droits des travailleurs et de l’activité syndicale. «Les remises en cause sont multiples. Notamment concernant le droit de grève où, par exemple, il sera exigé un préavis de 45 jours (soit un mois et demi) contre 8 actuellement», estime Lyes Merabet. Autre disposition décriée, celle de «fixer une durée» à un mouvement grève, ce qui, ajoute le président du SNPSP, «remet en cause totalement le principe de la négociation». Et ce qui mettra encore une pression plus grande sur les travailleurs c’est le «blocage du salaire durant les jours de grève».

Cet avant-projet de loi sera au menu de la réunion du Conseil national du SNPSP prévu le 11 de ce mois, affirme le président du syndicat.


L’avant-projet de loi portant code du travail
Un tour de vis social



La rentrée sociale s’annonce menaçante pour les travailleurs en affrontant un avant-projet de loi portant code du travail jugé pour le moins «liberticide».
Le texte élaboré par le ministère du Travail, de l’Emploi et de la Sécurité sociale prévoit une batterie de lois visant à restreindre «drastiquement» le droit des travailleurs, notamment en matière de libertés syndicales. Ainsi, le droit de grève se trouve menacé, car la «réforme» du ministère du Travail rend extrêmement compliquée la procédure de déclenchement d’une grève, mais surtout en introduisant une disposition «dissuasive».
Dans son article 341, l’avant-projet de loi stipule que «les journées de grève ne donnent lieu à aucune rémunération». Il est prévu également un article de loi qui stipule que «la durée du préavis fixé préalablement ne peut faire l’objet ni de gel, ni de reconduction, ni de report». Le texte introduit aussi des notions pouvant donner lieu à des interprétations judiciaires aussi vagues que floues. «L’occupation par des travailleurs en grève de locaux professionnels de l’employeur est interdite quand elle a pour objet de constituer une entrave à la liberté du travail», prévoit l’article 345 de cet avant-projet de loi.
Déjà que la loi en vigueur ne laisse pas beaucoup de possibilités aux travailleurs de défendre leurs intérêts socioprofessionnels et que les employeurs recourent souvent à la justice pour «mater» le droit syndical, le nouveau texte opère un autre tour de vis dans la relation de travail. Ce texte, qui devrait être débattu au Parlement durant la session d’automne, ramène l’âge légal du travail à 16 ans sous condition d’être autorisé par les parents.
Fragilité sociale
Avec cette mesure, le travail des enfants risque de se généraliser dans un contexte social marqué par la précarisation et la fragilité sociale qui touchent de nombreux foyers algériens. Une situation pas si facile à contrôler sachant que l’Inspection du travail qui a la charge de veiller au respect de l’application des lois est quasi absente. C’est une structure qui sommeille et parfois est actionnée pour «frapper d’une main de fer quand il s’agit de règlement d’un compte politique». Tout comme la justice et autres administrations, elle est devenue un instrument de «chantage». 
Par ailleurs, le code du travail régissant les relations de travail consacre l’Union générale des travailleurs algériens (UGTA) comme unique partenaire social, en jouant sur la représentativité. Les syndicats autonomes, pourtant représentatifs et surtout combatifs dans les secteurs de la Fonction publique, l’éducation nationale, l’enseignement supérieur et la santé, sont ainsi maintenus dans leur statut de syndicats à «combattre». Ils dénoncent leur exclusion dans l’élaboration du nouveau code du travail. Et pour apporter la riposte, ils se concertent et menacent d’une rentrée sociale explosive.
L’UGTA, dont la centrale syndicale bureaucratisée apporte un soutien sans faille aux différentes politiques économiques et sociales, ne s’est pas encore exprimée sur l’avant-projet de loi redéfinissant le code du travail. Abdelmadjid Sidi Saïd, de plus en plus contesté par une partie de la «base syndicale», est fortement attendu. Sa survie à la tête de «la Maison du peuple» est sérieusement menacée à la veille d’un congrès qui s’annonce âpre. Certains syndicalistes affiliés à l’UGTA comptent sur ce rendez-vous pour «redonner à l’organisation syndicale son rôle historique», mais ils redoutent un congrès «fermé, ne laissant aucune possibilité de débat démocratique».  
Le comité national de réappropriation du syndicat s’emploie activement à récupérer une UGTA totalement inféodée au pouvoir politique. Et si les syndicats et les travailleurs agitent d’ores et déjà la menace d’un «embrasement social», les regards seront tournés vers le Parlement, où le monde ouvrier espère une «résistance» des partis politiques se disant proches des préoccupations des travailleurs. Jusque-là, aucun parti politique représenté à l’Assemblée nationale ne s’est exprimé sur cet avant- projet de loi portant code du travail.

Hacen Ouali

RENCONTRE DE LA CONFÉDÉRATION GÉNÉRALE DU PATRONAT DU BTPH À ORAN

«Le projet de loi du code du travail est positif, complet et bien fait»

En prévision de la prochaine tripartite, la Confédération générale du patronat (CGP) du BTPH s’est réunie hier au niveau de l’hôtel Sheraton, afin de dresser un bilan de ses activités et soumettre par la même occasion des propositions relevant de son secteur, en évaluant le pacte économique et social. Un rapport sera soumis à la tripartite.
Amel Bentolba – Oran (Le Soir) – Le projet de loi du nouveau code du travail n’a pas manqué d’être soulevé par le président de la Confédération générale du patronat BTPH, M. Abdelmadjid Denouni, qui estime que pour la première fois dans l’histoire de l’Algérie toutes les lois qui touchent le monde du travail ont été réunies dans un seul document. «Notre première lecture et analyse de ce projet de code du travail nous a démontré qu’il est complet et répond à toutes les aspirations des entrepreneurs et aussi, pratiquement tous les salariés sont d’accord avec ces lois, sauf que l’UGTA a soulevé le problème du contrat à durée indéterminée. Ceci revient à l’Etat, cela ne nous inquiète pas. C’est un code positif, bien fait et sans contradiction». Il reviendra sur la loi relevant de son secteur, celle de 2011 qu’il qualifie de loi scélérate, qui fait augmenter le prix du logement locatif en Algérie. «Le nombre n’est pas réalisé à la cadence souhaitée, l’offre est très insuffisante par rapport à la demande. Le secteur est bloqué», dit-il et d’ajouter : «L’État tente de voir comment détourner cette loi, il est très difficile de réformer une loi, une année seulement après sa promulgation. C’est une loi qui a été faite sans l’assentiment des opérateurs du secteur, on ne nous a pas consultés. On demande à ce qu’on soit associés, libre à l’État par la suite d’appliquer ou pas ce qu’on demande et l’Histoire en sera témoin». Concernant les conséquences qui découleront de l’abrogation de l’article 87 bis, pour l’intervenant, le secteur économique doit produire davantage, ainsi, dira M. Denouni, «quand on augmente les prix, il n’y aura pas de spéculation dans les marchés. Pour cela il faut que l’État mette en place un environnement sain pour l’entreprise, moins d’impôt par exemple, plus de facilité fiscale, parafiscale, beaucoup plus de facilités en approvisionnement de matière première. Etc. c’est un tout, on ne peut pas augmenter les salaires et laisser le secteur économique à l’abandon. Pour le secteur du BTPH il n y a pas de problème, ni d’incidence directe, parce que tous les prix sont actualisés et révisés». L’intervenant insiste sur la nécessité d’appliquer une véritable démocratie économique en matière d’octroi du foncier et ouvrir les marchés publics à tout le monde. Et permettre à tous de créer une entreprise. Concernant la concurrence que connaît le secteur avec les entreprises étrangères, le président de la CGP estime que l’État devrait les mettre sur un pied d’égalité. «On a un programme de réalisation d’un million de logements. Pour ce faire la capacité de réalisation des entreprises étatiques ne dépasse pas 90 000 logements/ an et on a un déficit de 110 000 logements/an. Les entreprises étrangères doivent donc réaliser 100 000 logements. Actuellement, ces entreprises étrangères réalisent 20 000 logements, donc nous avons toujours un déficit de 90 000 logements.» Pour l’intervenant, il était temps que l’État accorde des partenariats entre le secteur public et le secteur privé. «A travers ce partenariat on peut réaliser des barrages, des aéroports, des logements… D’ailleurs le gouvernement a répondu à cette demande dans le cadre de partenariat dans le secteur des travaux publics, environ une quinzaine de groupements publics entre le privé et l’étatique ont été accordés».
A. B.

Les salaires font toujours débat

par A. El Abci


Les relations qui régissent la relation employeur-travailleur doivent être revues et c’est ce que le nouveau code du travail s’est attelé à réaliser. C’est ce qu’a déclaré hier le président de la confédération des entreprises algériennes (CGEA) à Constantine, Habib Yousfi, lors de la journée d’évaluation de la section des entrepreneurs femmes de l’Est, affilée à sa confédération, qu’il a supervisée et qui s’est déroulée au siège de l’office de l’ODEJ de la ville des ponts. Le président de la confédération a rappelé qu’il s’agit en vérité d’une réorganisation du code du travail, dont celui en vigueur comporte des dispositions qu’il y a lieu d’adapter, car elles datent de la phase socialiste par laquelle le pays est passé. «Cependant, il y a lieu d’en convenir que cela fait partie du passé et que nous sommes en économie de marché maintenant, d’où la nécessité de regarder de l’avant en adaptant nos lois au monde actuel, notamment, les relations contractuelles entre l’employeur et le travailleur pour faire efficacement face aux défis qui nous attendent, qui ont pour nom compétitivité, concurrence …».

Et l’orateur de poursuivre, «en réalité c’est depuis 2005 que nous discutons de ce nouveau code». Et de s’étonner de voir que des syndicats qui ont participé à ces discussions et qui étaient jusque-là d’accord, soulignera-t-il, aient changé complètement de ton récemment en exprimant leur hostilité et leur refus de ce code. Parlant ensuite de la grève, il soulignera que «ce mode d’expression du monde du travail est un droit consacré par la Constitution, et personne à ce que je sache ne veut revenir dessus, toutefois nous pensons qu’il faut qu’il soit encadré, car sinon c’est la porte ouverte aux grèves sauvages. Et là c’est tout le monde qui perd, y compris les travailleurs en ce sens que c’est la dynamique du développement et de création d’emplois qui s’en trouve menacée».

Questionné sur l’abrogation de l’article 87 bis du code en vigueur, le président de la CGEA notera que là il s’agit d’une décision souveraine du président de la République, qui aura certainement des répercussions sur les salaires en les tirant vers le haut. «Augmentation de salaires, à l’égard de laquelle nous ne sommes pas contre a priori et que nous pouvons donc accepter de revaloriser les salaires, mais cela ne pourra pas aller sans contrepartie, à savoir une augmentation parallèle de la productivité. Des salaires revalorisés doivent aller de pair avec des améliorations dans la productivité», conclura-t-il.

Le MDS : «La nouvelle loi privilégie les intérêts des forces de l’argent»

Le parti du défunt Hachemi Cherif se rebiffe.


Veille de rentrée et dans sa déclaration au vitriol, rendue publique hier, le Mouvement démocratique et social pointe du doigt les errements et «contradictions» de la politique du «nouveau» gouvernement «dont la vocation, souligne-t-il, paraît être de se mettre en adéquation avec une ligne basée sur des illusions masquant une forme de national libéralisme». Tout en «se félicitant de certaines évolutions», comme l’abrogation du 87 bis, la libération des otages algériens et/ou la nouvelle loi contre les violences faites aux femmes, le MDS n’en tire pas moins la sonnette d’alarme quant aux périls des régressions à venir.
Le MDS déclare ainsi «craindre » que le nouveau code du travail vide le cadre juridique régissant la relation de travail de «tout aspect progressiste». «Il porte en lui une remise en cause grave du droit de grève, souligne-t-il : avec une disposition qui stipule que la suspension de la relation de travail intervient de droit par l’exercice du droit de grève, même dans le cadre de la loi. Ce qui remet en cause un droit constitutionnel».
Le MDS note par ailleurs que le nouveau texte ne renferme «aucune disposition renforçant les droits de certaines catégories, comme les enfants ou la sécurité et la santé des travailleurs, alors qu’on assiste à une augmentation alarmante des décès dus aux accidents de travail». Plus grave, s’alarme-t-on, ce nouveau code vient «consacrer la précarité au nom de la flexibilité. Rien n’est fait pour lutter contre le travail informel qui constitue une plaie et le contrat à durée déterminée va pouvoir ainsi se généraliser ».
Tout cela constitue, d’après le MDS, une pression insupportable sur les salaires. «Il est clair que cela indique une volonté de privilégier les intérêts des forces de l’argent qui se sont avérées comme le principal soutien du pouvoir à l’occasion de la dernière présidentielle». Le conseil national du MDS s’est exprimé sur nombre d’autres sujets, dont la condamnation en appel de Ould Dada pour avoir diffusé une vidéo dénonçant le comportement de la police à Ghardaïa, ou l’interdiction d’un syndicat autonome à Sonelgaz «expressions spectaculaires », selon le MDS, appelant à la «rupture , la seule qui peut garantir que les acquis des luttes iront en s’élargissant et ne seront pas remis en cause». Le MDS annonce tenir sa conférence des cadres les 23, 24 et 25 octobre prochain, et son congrès avant la fin de l’année.             
Mohand Aziri

Education : Intégration et promotion de 150.000 travailleurs

par R. N.


Près de 150.000 enseignants et travailleurs du secteur de l’Education nationale bénéficieront, avant décembre 2014, d’une intégration et d’une promotion dans de nouveaux postes après la suppression des grades «en voie de disparition», a affirmé hier à Alger le directeur des Ressources humaines au ministère de l’Education nationale, Boussahia Abdelhakim.

Lors d’un point de presse au siège du ministère, M. Boussahia a indiqué que le nombre de grades en voie de disparition dans le secteur de l’Education nationale «est estimé à 149.248 postes jusqu’à la fin de l’année en cours». Les grades en question concernent les enseignants, les laborantins, les corps communs et les professionnels du secteur. Les titulaires de ces postes, qui ne feront plus l’objet de recrutement, «bénéficieront, soit d’une intégration ou d’une promotion, et ce dans le cadre des statuts particuliers et en application de la circulaire ministérielle n°004 et d’une circulaire complémentaire». La régularisation des situations professionnelles et financières de ces enseignants et travailleurs des corps communs avait fait l’objet de plusieurs mouvements de protestation des syndicats sectoriels qui ont soulevé aux tutelles concernées quelque 36 revendications à ce propos.

Selon M. Boussahia, toutes les revendications ont été satisfaites, à l’exception de 4 d’entre elles qui vont à l’encontre du texte principal, soit l’ordonnance 06-03, portant statuts de la fonction publique. «La tutelle ne peut, à elle seule, examiner les revendications qui n’ont pas été satisfaites», a martelé la ministre. D’autres secteurs tels que la Fonction publique et le ministère des Finances ont leur mot à dire dans de telles situations, car chaque promotion ou intégration est accompagnée d’un impact financier qui doit être inscrit dans la loi de finances.

A noter que 61.446 enseignants ont bénéficié d’intégration et de promotion dans le cycle primaire dont 40.970 ont bénéficié d’intégration dans les nouveaux postes (catégorie 14) en tant qu’enseignants formateurs et le reste (20.476) ont bénéficié d’intégration et de promotion en tant que professeurs principaux (catégorie 12). Pour le cycle moyen, l’opération d’intégration et de promotion a touché 16.681 enseignants, a indiqué M. Boussahia, rappelant le décret exécutif 12-204 qui a créé de nouveaux postes dans le corps des enseignants.

S’agissant des fonctionnaires des corps de l’enseignement n’ayant pas 10 ans d’ancienneté, ils suivent actuellement une formation spécialisée (une année au lieu de trois), et ce à la demande des syndicats, selon M. Boussahia. Il s’agit de 74.104 professeurs d’enseignement élémentaire et 25.118 dans l’enseignement primaire. Pour les corps des fonctionnaires de l’Education (auxiliaires de l’Education), le même responsable a indiqué que la promotion de ces derniers (22.100), qui ont été promus au poste de superviseur de l’Education, «s’est faite selon l’ancienneté», en attendant que les concernés passent un examen lors des sessions d’octobre et de novembre.

L’opération d’intégration et de promotion concerne par ailleurs les fonctionnaires de l’orientation scolaire et les laboratoires qui ont été intégrés dans les corps de l’Education, à travers l’inscription dans les listes de mise à niveau ou de promotion. Il s’agit de 3.001 fonctionnaires des laboratoires, de 2.000 fonctionnaires de l’intendance et 224 infirmiers.

Education : le Satef encense la ministre et interpelle le gouvernement



Partant du constat que certains dossiers parmi ceux posés sur la table par les syndicats «dépassent les prérogatives de la ministre de l’Education nationale», le Syndicat autonome des travailleurs de l’éducation et de la formation (Satef) a appelé le gouvernement à prendre les mesures qui s’imposent pour régler, une bonne fois pour toutes, les problèmes que vit le secteur de l’éducation. Le Satef, qui reconnaît «une volonté et une oreille attentive chez la nouvelle ministre», constate, en revanche, que «certains dossiers dépassent ses prérogatives». «Alors, si ce gouvernement veut réellement une stabilité dans notre secteur, il doit avoir le courage de prendre des décisions qui ne plairont pas à tout le monde, mais qui vont résoudre les problèmes définitivement, les travailleurs cherchant des solutions concrètes», estime le Satef. Décrivant les conditions dans lesquelles se présente la rentrée scolaire 2014-2015, le Satef établi un constat pour le moins critique. «Les rentrées scolaires se suivent et se ressemblent, les conditions pédagogiques et matérielles qui doivent assurer une rentrée scolaire parfaite ne sont pas réunies», assure le syndicat qui note que «si la rentrée scolaire va se faire sans grabuge, l’année scolaire connaîtra sûrement une instabilité et des perturbations vu qu’on n’a pas évolué d’un iota, l’ensemble du système scolaire reste tel qu’il est». «En septembre 2012, les collèges accueillaient la double cohorte d’élèves en première année moyenne avec des problèmes de tout genre. En cette rentrée scolaire 2014/2015 le problème est transféré dans nos lycées», affirme le Satef qui cite, notamment, le problème posé par l’augmentation des effectifs en terminale qui ont
induit une surcharge des classes et des conditions d’accueil qui «restent presque les mêmes vu le nombre de lycées inscrits et non encore réalisés». «Ce qui, relève le Satef, va engendrer des comportements violents chez nos élèves, alors que la violence est déjà en augmentation dans la société.» «Les programmes sont inadaptés, la pédagogie n’est pas la priorité du système, le statut particulier du travailleur n’a pas pris en considération toutes les revendications des travailleurs, en bref, les grands dossiers sont malheureusement en suspens», constate encore le syndicat qui cite, entre autres, l’indemnité et les primes de zone, la médecine du travail, les rythmes scolaires et le logement. Le Satef indique aussi que «la réforme de l’éducation demeure toujours la même avec ses insuffisances, nonobstant tous les constats négatifs signalés par tous les intervenants dans les conférences de bilans d’évaluation». De même pour l’enseignement de tamazight qui, d’après le Satef, «est toujours au stade d’expérimentation après 18 ans depuis son introduction dans l’école algérienne». Le Satef soulève, par ailleurs, la question des concours de recrutement qui «ne sont pas transparents» et de «l’impunité et l’incompétence qui continuent à régner dans les postes de responsabilités et les vautours ainsi que les charognards qui continuent à sucer le sang et la sueur des honnêtes travailleurs».
Amine Sadek
 

Le Syndicat autonome de Sonelgaz poursuit Boutarfa en justice



Les déclarations tenues récemment par le président-directeur général du Groupe Sonelgaz, Noureddine Boutarfa, qui a remis en cause la représentativité au sein de l’entreprise au tout nouveau Syndicat national autonome des travailleurs de l’électricité et du gaz, ne sont pas passées inaperçues, et il semble même qu’elles ont suscité l’ire des syndicalistes qui ont décidé d’intenter une action en justice contre leur patron. Dans un communiqué rendu public ce lundi, le Syndicat, qui a obtenu tout récemment son agrément auprès du ministère du Travail, de l’Emploi et de la Sécurité sociale, assure avoir pris la décision d’engager des poursuites judiciaires contre Bouterfa. Le Syndicat reproche au premier responsable du Groupe Sonelgaz ses déclarations dans lesquelles il remettait clairement en cause sa représentativité au sein de l’entrepris. Le patron de Sonelgaz affirmait, notamment, que le Syndicat autonome, nouvellement créé par des syndicalistes réfractaires à l’UGTA, n’était pas autorisé à activer, allant jusqu’à indiquer que l’organisation n’existait même pas au sein de l’entreprise qu’il dirige. Outrés par de telles déclarations, les syndicalistes du SNATEG ont donc décidé de recourir à la justice pour réparer ce qu’ils estiment être une offense à leur organisation, pourtant officiellement agréée par les autorités. Le Syndicat s’élève, dans le même registre, contre ce qu’il considère comme des menaces proférées par le P-DG de Sonelgaz contre tout travailleur de l’entreprise qui serait affilié au SNATEG. De ce fait, le Syndicat autonome de Sonelgaz a décidé de constituer un collectif d’avocats pour défendre ses intérêts et faire cesser ce qu’il qualifie de campagne de dénigrement contre l’organisation.
A. Sadek

Les postiers annoncent une grève pour la fin septembre



Le Front pour la sauvegarde des droits et de la dignité du postier algérien (FSDDPA) annonce, dans un communiqué, un mouvement de grève des travailleurs de la poste avant la fin du mois de septembre. La date précise sera rendue publique dans les jours qui viennent, précise le FSDDPA. Ce collectif représentant les travailleurs d’Algérie Poste, entend, à travers l’appel à la grève, «tirer la sonnette d’alarme» et alerter les pouvoirs publics sur des agissements de la direction générale d’Algérie Poste. Cette dernière commet, selon le FSDDPA, des actes «contraires à la réglementation» et multiplie «les sanctions disciplinaires abusives» envers le personnel de l’entreprise, dont l’inspecteur Yahia Belmokhtar qui vient d’être suspendu pour avoir «refusé de cautionner un détournement de fonds avéré dans un bureau de poste situé dans d’une localité de la daïra de Hadjout, dans la wilaya de Tipaza». Le FSDDPA, qui précise dans le communiqué parvenu à la rédaction qu’il n’est «ni un syndicat ni une organisation officielle» et n’a besoin, de ce fait, d’aucun agrément, témoigne de «l’intégrité de Yahia Belmokhtar ciblé pour la seconde fois par une mesure disciplinaire pour avoir refusé de garder le silence sur des comportements déviants». Le FSDDPA, qui soutient que son objectif est de «défendre les intérêts de l’entreprise et de dénoncer la corruption», s’insurge contre les «règlements de comptes et l’abus de pouvoir» et rappelle qu’il soutient tous les travailleurs d’Algérie Poste victimes d’abus de pouvoir et de décisions arbitraires. Le FSDDPA réitère aussi son appui à deux collègues syndicalistes, Ammar Khodja et Mourad Nekache, membres du Syndicat national autonome des postiers (Snap), victimes selon lui de suspension «abusive» de la part de la direction générale de l’entreprise, accusée d’«enfreindre la réglementation et de taire les détournements et le blanchiment d’argent».
Meriem Sassi


    

L’entreprise Socerca liquidée et une centaine d’ouvriers mis au chômage

Le feuilleton de la fameuse entreprise de production de carreaux et sols (Socerca) d’Amizour, filiale du groupe SGP, a pris fin après que ce groupe ait décidé de dissoudre cette société, à l’issue d’une assemblée générale extraordinaire (AGE), tenue à la fin du mois d’août. Un coup dur pour une centaine d’ouvriers travaillant au sein de cette entreprise, forcés au chômage après plusieurs années de lutte pour la sauvegarde de «leur usine». Toutefois, les pouvoirs publics ont dégagé quelque 15 milliards de centimes pour indemniser ces travailleurs et obtenir «une fermeture sans bruit de l’entreprise».

«Nous avons attendu que les pouvoirs publics redressent la situation de l’entreprise par l’injection d’argent qui servirait au renouvellement de ses équipements de production, devenus obsolètes, mais en vain», a déclaré l’un des ouvriers. Pour l’Union de wilaya (UGTA), qui a également milité pour la sauvegarde de l’entreprise, la «décision de liquidation et de fermeture de Socerca est un crime commis à l’encontre des travailleurs et de l’économie locale».

Par ailleurs, plusieurs travailleurs trouvent décente et acceptable la somme d’argent octroyée à chaque ouvrier suite à la fermeture de l’usine, implantée il y a plus de 20 ans dans la commune d’Amizour. «Je pense qu’avec 150 millions de centimes, l’on peut prendre soin de sa famille», s’est réjoui l’un des employés de Socerca.
Riad Madi
 

«les Politiques de l’emploi et les programmes actifs du marché du travail»



SELON UN RAPPORT D’UNE FONDATION EUROPÉENNE
La politique algérienne de l’emploi reste à évaluer, réformer et rénover
La politique algérienne en matière d’emploi et de gestion du marché du travail reste à bien évaluer, réformer, rénover. C’est le constat, la conclusion à laquelle aboutit un rapport sur la politique de l’Algérie dans le domaine de l’emploi, élaboré pour le compte de la Fondation européenne pour la formation (ETF).

Chérif Bennaceur – Alger (Le Soir) – Un rapport a été rédigé en juillet 2013 par un chercheur du Centre de recherches en économie appliquée au développement (Cread), Mohamed Saïb Musette, en collaboration avec Moundhir Lassassi et Mouloud Mohamed Meziani, au profit de la Fondation européenne pour la formation et de la Commission européenne, dans le cadre du dialogue politique entre l’Union européenne et l’Algérie.
Finalité du rapport
Intitulé «les Politiques de l’emploi et les programmes actifs du marché du travail», ce rapport comporte une analyse affinée de la politique de l’emploi en Algérie. En effet, la vocation de ce rapport n’est pas d’analyser les tendances et défis des marchés de l’emploi, mais plutôt de dresser l’inventaire des politiques actuellement menées en matière d’emploi et des programmes actifs du marché du travail (PAMT) existants, et d’en évaluer les résultats ainsi que l’efficacité à relever les défis représentés par l’emploi. Ainsi, ce rapport observe que même si le «Printemps arabe» a épargné l’Algérie, des révoltes de la population, notamment juvénile dans le sud du pays, ont éclaté, quoique «contenues » et les autorités ont dû céder aux revendications salariales. Voire, l’accès des jeunes au marché du travail a été rendu davantage aisé.
De la politique nationale de l’emploi
Présentant un contexte économique et social alors relativement favorable, le rapport indique qu’un budget de 350 milliards de dinars (environ 4,7 milliards de dollars) a été consacré au profit de la création d’emplois. Ce faisant, une politique nationale de l’emploi et de résorption du chômage (accompagnement de l’insertion professionnelle des diplômés, soutiens à la création de micro-entreprises, financement des dispositifs d’emplois d’attente…) a été initiée dès 2008 et confortée par la mise en place de dispositifs et services dédiés, tout en subissant ultérieurement des réajustements et une hausse des dotations budgétaires.
Des services dédiés
Considérées comme les principaux acteurs des politiques de l’emploi et de la gestion des PAMT, voire de la lutte contre la pauvreté, cinq principales agences publiques, l’Agence nationale pour l’emploi (Anem), la Caisse nationale d’assurancechômage (Cnac), l’Agence nationale de soutien à l’emploi des jeunes (Ansej), l’Agence de développement social (ADS) et l’Agence nationale de gestion du microcrédit (Angem), dont la tutelle relève des ministères du Travail, l’Emploi et la Sécurité sociale et de la Solidarité nationale ont vu leurs rôles renforcés et leurs activités réorganisées, tout en bénéficiant de l’augmentation de leurs dotations budgétaires.
Des résultats probants annoncés officiellement
Une dynamique stimulée par l’Etat, marquée par des résultats qualifiés officiellement de probants en termes de création d’emplois (deux millions annoncés en 2011, un objectif de création de 3 millions d’emplois concrétisé à 80% à la fin 2012) mais que le rapport ne manquera pas de remettre en cause de manière objective. Outre le fait que le chômage ait amorcé une décrue, se stabilisant entre 2011 et 2012 à un taux de l’ordre de 10%, soit un peu plus de 1 million de chômeurs, voire moins par la suite. Et cela même si le rapport note des contradictions entre les données administratives et celles statistiques des enquêtes sur les forces de travail (EFT) qu’élabore l’Office national des statistiques (ONS).
Contradictions en matière de collecte des informations
A ce propos, le rapport note que plusieurs EFT n’ont pas été publiées, parfois bloquées par le gouvernement. Comme l’on relève que les EFT et les données administratives sont deux sources d’informations qui agissent chacune avec «sa logique» et «ses limitations». Voire, la rédaction de ce rapport a été contrainte, relève-t-on, par «une certaine réticence à divulguer des informations sur les activités des diverses agences au point que l’on peut parler de véritable occultation», même si nombre de données chiffrées sont rapportées ultérieurement.
Faiblesse du taux d’activité
Analysant la situation du marché du travail, en se référant à l’ONS, le rapport constate notablement la faiblesse du taux d’activité global (de 42% en 2010 à 39,59% en 2011-2012), en faisant état de 10,6 millions d’occupés (dont 9,56 de salariés), sur un potentiel de 27 millions de main-d’œuvre potentielle et une population de 37 millions d’habitants en 2012. Certes, le taux de chômage a décru alors (à 9,96% soit 1,062 million de chômeurs) mais demeure élevé en milieu urbain, chez la population féminine plus vulnérable (17,2%), chez les jeunes (24%) et de manière spécifique pour les jeunes du secondaire et les universitaires femmes. Le taux de chômage des universitaires et des diplômés de la formation professionnelle est également élevé (+13% pour les premiers), note le rapport qui met en avant l’«inadéquation» des formations et le recours élevé à la main-d’œuvre étrangère. Egalement, le rapport note que la participation des femmes au marché du travail stagne à 14,2%.
L’emploi informel aurait baissé
De même, il apparaît que le marché du travail «n’est pas encore sorti des turbulences sociales», avec l’émergence de nouveaux porteurs de revendications, notamment dans le Sud où l’intégration des jeunes continue depuis de constituer un défi. En outre, le rapport observe la faible part du secteur productif, la prédominance du secteur privé (employant à hauteur de 60%), la dominance des emplois temporaires (79,5%). Certes encore prégnant et à l’origine selon le rapport des agitations sociales du début 2011, le secteur informel se caractérise toutefois par le ralentissement de l’emploi, en raison des mesures répressives et d’intégration décidées par les pouvoirs publics. Faisant état d’un niveau d’informalité (défini par l’absence de protection sociale de l’emploi) de 40,7% en 2011 contre 45,6% en 2010, le rapport note toutefois que l’EFT indique un taux d’emploi informel de 73,3% et que la Banque mondiale cite 34,8% du PIB.
À propos des salaires
D’autre part, le rapport évoque le système de rémunération différencié dans le secteur public mais aussi privé, en rappelant l’instauration du Salaire national minimum garanti (SNMG) et la contrainte que pose l’article 87 bis du code de travail, en vigueur depuis la mi- 1990. Mais aussi en citant l’absence de contrôle systématique et régulier de l’évolution des salaires, malgré les enquêtes de l’ONS et les rapports de la Caisse nationale d’assurances sociales (Cnas), et même si des augmentations salariales ont été concédées, le SMG «revu à la hausse sans incidences sur les secteurs économiques» et les pensions de retraites légèrement augmentées en 2013.
L’Algérie n’a pas innové
Des contraintes et «une forte pression» sur le marché du travail que l’insuffisante croissance économique, le rapport constatant que la situation budgétaire est «insoutenable» actuellement, le défi démographique croissant (hausse du taux de natalité de 1,3%), l’absence de système régional d’alerte, le défi de la maîtrise des dépenses sociales et le coût élevé des programmes d’emploi, risquent néanmoins d’aggraver et de les rendre insurmontables. Davantage critique, le rapport de l’ETF observe qu’en matière de stratégie dédiée à l’emploi, «l’Algérie n’a pas innové ». Ainsi, les concepteurs des politiques de l’emploi ont «simplement renforcé la voie adoptée dès 2008» et «l’emploi est régi par plusieurs séries de loi, régulièrement actualisées mais qui restent obscures», considère- t-on. En outre, le nouveau code du travail, attendu depuis 2000, se fait «encore attendre» selon les rédacteurs du rapport de l’ETF qui notent qu’«aucun changement législatif majeur n’a été opéré» et évoquent la poursuite du combat syndical, la dominance de l’Union générale des travailleurs algériens (UGTA) et le dynamisme des syndicats autonomes.
Des services dédiés mais aucune évaluation
Dans un autre chapitre, les concepteurs du rapport analysent l’action des services dédiés aux PAMT et voués à atténuer les tensions sociales (Anem et ADS) et à développer la création d’entreprises (Ansej, Cnac et Angem). Au-delà des chiffres sur le nombre d’emplois créés et de l’évolution de leurs missions et de leurs moyens d’actions, sur trois générations, l’on note, ce faisant, que des efforts ont été «fournis» par l’Etat mais qu’«aucune évaluation concrète n’a été encore effectuée». Critiquant clairement le manque de visibilité de la politique de l’emploi, le rapport observe une «contradiction apparente» des statistiques du marché du travail. Certes, «l’EFT a le mérite d’exister», note-t-on, «mais elle n’est conçue ni pour évaluer l’efficacité des politiques ni pour en mesurer les incidences ». A ce propos, l’on note que le nombre de 2 millions créés n’est qu’«une estimation qui ne repose sur rien». Comme il s’avère difficile de vérifier la comptabilité des agences et autres informations relatives aux budgets, le nombre et les caractéristiques des bénéficiaires, le taux d’abandon, le suivi des bénéficiaires et l’évaluation de l’efficacité de la politique en termes de taux de placement, d’incidence sur la durée du chômage et de qualité de l’emploi (par exemple, revenu moyen, travail formel). En d’autres termes, «les interventions de l’État ont certainement eu une incidence sur le marché du travail et, dès lors aussi, sur le taux de chômage, mais en l’absence d’évaluation d’impact, exécutée dans le respect des normes techniques et scientifiques, il n’est pas facile de discuter de la relation entre l’intervention de l’État (selon les sources administratives) et le niveau de chômage en Algérie (selon l’EFT)», est-il rapporté.
Des experts donnent des avis mitigés
Par ailleurs, le rapport de l’ETF se base sur les points de vue de 10 experts, au rang desquels figurent des agents de l’État, d’anciens hauts responsables des agences de l’emploi, des représentants des partenaires sociaux (syndicats et organisations patronales) et des représentants de la société civile. Appelés à se prononcer sur les avantages et inconvénients des programmes, l’existence de bonnes pratiques», l’opportunité de la révision, voire la nécessité d’une nouvelle politique, les «avis» de ces experts ont été assez mitigés. Si certains experts consultés considèrent les PAMT comme «essentiels» et devant être maintenus tels quels, car ayant permis une certaine «dignité » retrouvée et constituant de «bonnes pratiques», d’autres consultants expriment des avis contraires. Selon ces experts qui les qualifient de «déplorables», en relevant tant l’absence de relations intersectorielles, la fragmentation des responsabilités que l’existence de moult dysfonctionnements, insuffisances et incohérences par rapport à la réalité, les programmes de l’emploi doivent être revus.
De la nécessité d’une nouvelle politique de l’emploi
Voire, la nécessité d’une nouvelle politique de l’emploi et de lutte contre le chômage s’impose selon ces consultants qui prônent la nécessité d’une évaluation complète des mesures proposées et appellent à instaurer un nouveau système politique basé sur l’intérêt national, impliquant le secteur public et le secteur privé. Un constat que le rapport de l’EFT semble partager dans ses conclusions. Ainsi, l’on constate que l’élément central autour duquel s’articulent les politiques de l’emploi en Algérie est la mise en œuvre de PAMT par diverses agences publiques, chacune s’étant vu attribuer des programmes différents et bénéficiant de ressources substantielles». Pourtant, «malgré l’énorme quantité de ressources qu’elles absorbent, les informations sont limitées ». Or, si «l’accent est mis essentiellement sur les PAMT et nettement moins sur les politiques de création d’emplois, sur le système d’études et sur la sécurité sociale», fait-on ressortir, des «solutions à plus long terme» peuvent cependant «nécessiter des réformes plus approfondies du marché du travail».
Des «réformes» de l’environnement requises
Il s’agit de «l’amélioration de l’environnement des entreprises et la restructuration économique, le changement du cadre législatif et des institutions, la rationalisation du secteur public, le rapprochement des conditions de travail entre le secteur public et le secteur privé, la croissance des PME et le développement d’un solide secteur privé, l’amélioration des conditions sur le secteur informel… ». De même, l’on estime nécessaire de se concentrer davantage sur l’amélioration de la qualité de l’enseignement et du système d’apprentissage tout au long de la vie.
Penser à une éducation «sérieuse»
Certes, «l’éducation a été la priorité, drainant de nombreux investissements publics et privés au fil des années et permettant de beaux progrès en matière d’accès universel », note-t-on. Toutefois, « le retour sur investissement laisse à désirer en termes de résultats significatifs en matière d’éducation», relève-t-on. Ainsi, «il est sans doute moins onéreux et plus rentable de prévenir les problèmes grâce à une éducation sérieuse et de bonne qualité dès le plus jeune âge que d’y remédier ultérieurement au moyen de mesures de PAMT», est-il observé. De fait, l’on estime qu’«une évaluation réelle s’impose. Nous savons que les PAMT peuvent avoir des effets positifs sur les personnes individuelles, mais ils peuvent aussi n’avoir aucune incidence, voire même avoir une incidence négative, sur l’économie : par exemple, des pertes d’efficacité, un effet de substitution eu égard aux salaires subventionnés, voire un effet de déplacement». Cependant, «sans évaluation préalable, nous ne disposons d’aucune preuve plaidant en faveur ou en défaveur d’une quelconque incidence, bien que nous sachions que les programmes créent généralement des emplois temporaires, et aucune information n’est disponible concernant l’impact à long terme ou la permanence», écriton.
Le développement du secteur privé incontournable
En somme, les programmes «ne traitent dès lors pas les problèmes sous-jacents de l’économie réelle et de sa capacité génératrice d’emplois, mais ils postposent au contraire les problèmes». Et dans la mesure où «l’Algérie est généralement considérée comme un pays doté d’un environnement d’affaires strict qui limite le développement de son secteur privé. Si le secteur privé ne peut croître, il apparaît difficilement possible de résoudre le problème du chômage sans injection permanente de fonds publics ».
Ce que l’EFT recommande
L’opportunité pour le chercheur du Cread et l’ETF de formuler quelques recommandations à l’adresse du gouvernement. Ainsi, l’on recommande d’établir un observatoire national pour l’emploi et la formation qui produira des données fiables et développera des options stratégiques fondées sur leur analyse. Cet observatoire pourra ainsi «mener une enquête annuelle portant sur l’emploi (contenant moins de questions) auprès d’un échantillon plus large, organisée quatre fois par an auprès d’un échantillon à chaque fois partiellement différent». Autres missions, «garantir la publication des données et des résultats (l’ONS ou tout autre centre de recherches pourrait réaliser l’EFT pour l’observatoire) ; réaliser des études approfondies à intervalles réguliers sur des thèmes spécifiques tels que l’emploi des femmes, l’emploi informel, l’emploi des jeunes, le travail des enfants, l’emploi des seniors ou le marché du travail rural et mener régulièrement des enquêtes sur les salaires couvrant toutes les formes de forces de travail, notamment les très petites entreprises». Comme l’on recommande de réactiver le Conseil supérieur de la statistique, de former le personnel des services administratifs à la préparation des données conformément aux normes et normes scientifiques en termes de flux, en particulier avec des programmes d’entrée et de sortie ». Egalement, de mettre en place une équipe d’experts qui analysent régulièrement les données et développent des options stratégiques solides fondées sur les résultats des analyses à l’adresse du gouvernement.
Réformer progressivement les PAMT
En second lieu, on conseille de «maintenir les programmes existants moyennant quelques ajustements à court terme et une réforme totale à moyen terme, après une évaluation rigoureuse de l’impact». Ainsi, le gouvernement «devrait lancer une évaluation complète et un processus d’analyse de l’impact des programmes existants, et les résultats des programmes portant sur le marché du travail doivent être diffusés». À partir de cette analyse, «la structure des agences et leurs programmes doivent être révisés. Deux agences, à savoir l’Ansej et l’Angem, peuvent être transformées en une institution de microfinance unique. Cette institution devrait également être ouverte au secteur privé et devrait opérer de façon transparente». Les trois autres agences, à savoir l’Anem, la Cnac et l’ADS, doivent revenir à leurs missions initiales, à savoir le placement, l’assurance chômage et la lutte contre la pauvreté respectivement.
Planifier avec le privé, développer la coordination locale
En troisième lieu, l’on considère que «tous les programmes en matière d’emploi et d’activation du marché du travail doivent être planifiés avec le secteur privé qui devrait y être davantage associé, de «les Politiques de l’emploi et les programmes actifs du marché du travail» la phase de conception jusqu’aux phases de mise en œuvre, de contrôle et d’évaluation ». Aussi, «les fonds publics devraient soutenir stratégiquement le développement de certains secteurs économiques». D’autre part, «le marché du travail étant une entité horizontale, il n’est pas réaliste de tenter d’obtenir une solide coordination intersectorielle au niveau national. Une telle coordination peut toutefois se développer et exister de manière efficace au niveau local», est-il écrit. La coordination nationale devrait être dirigée par le Premier ministre. La direction de l’Observatoire national de l’emploi devrait dès lors être confiée au Premier ministre. Une direction intersectorielle doit être créée afin de gérer toutes les questions se rapportant au marché du travail. L’emploi ne devrait pas être la responsabilité unique du ministre du Travail, de l’Emploi et de la Sécurité sociale.
C. B.

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