Société

Les notables du M’zab s’insurgent contre les mensonges et les surenchères

Dans une lettre adressée aux médias publics et privés, cette instance du conseil de cheikh Ba Abderrahmane El Korthi a senti le besoin de «clarifier certaines choses et corriger certains concepts qui dénaturent la vérité».


Les notables de la région se demandent pourquoi n’arrive-t-on toujours pas à rétablir la paix à Ghardaïa

La gravité et la sensibilité de la situation exigent, disent les notables du M’zab, que l’information rapportée soit exacte et dénuée de surenchère. «Nous sommes devant une crise nationale qui touche à l’unité du pays.
Comme tous les Algériens jaloux de l’unité du pays, nous nous interrogeons avec un sentiment de colère et de tristesse : pourquoi Ghardaïa ? Qui est derrière ce qui s’y passe ? Quel sens donner aux déclarations de certains politiques qui attisent le feu ? A qui cette situation profite-t-elle ?» s’insurgent les notables de la région, en se demandant pourquoi n’arrive-t-on toujours pas à rétablir la paix à Ghardaïa. «Le temps n’est-il pas encore venu pour les habitants de privilégier la voie du dialogue ? N’est-il pas temps pour les autorités de maîtriser et contrôler sérieusement la situation ?» assène la lettre des notables.
Et de rappeler que deux années durant, Ghardaïa a brûlé et a emporté la vie de 40 personnes sans compter le nombre élevé de blessés, ou encore les biens saccagés et les familles ayant quitté leurs foyers, terres et quartiers. «Alors que des voix s’élevaient pour faire cesser la fitna, les hauts responsables ont fait la sourde oreille et ont qualifié les événements de ‘chahut de gamins’…Ce n’est que quand la situation a commencé à menacer la stabilité du pays que nous avons senti un réel engagement des autorités.»
Ces mêmes notables, qui saluent les efforts consentis sur le terrain pour le retour à la paix, regrettent que de hauts responsables continuent d’évoquer, dans leurs déclarations, des histoires de financement et d’encouragement d’un pays frère à la déstabilisation de la région. La lettre des notables du M’zab précise que l’unité et la stabilité du pays sont une ligne rouge à ne pas franchir.
«Nous n’acceptons pas les surenchères et n’attendons d’aucune partie des leçons de nationalisme et de défense de l’unité nationale.» Et d’ajouter : «Nos structures ont de tout temps veillé à inculquer aux jeunes Mozabites les valeurs du nationalisme et de défense du pays, ainsi que l’esprit d’initiative en bannissant l’assistanat, en ne comptant pas sur les seules subventions de l’Etat… Nous avons eu la preuve aussi, durant la décennie noire, du rejet par nos jeunes de l’extrémisme et de la violence.»
Par ailleurs, les notables du M’zab s’élèvent contre toute atteinte visant les structures d’organisation et de représentation mozabites qui «ont toujours appelé à la paix et à l’application de la loi tous les responsables de ces événements, quelle que soit leur appartenance».
Outre la justice qui doit s’appliquer à tous les criminels qui ont plongé Ghardaïa dans une dangereuse situation, les notables exigent que la justice détermine quels sont les véritables commanditaires et les condamne. Et de demander que «les initiateurs d’appels au crime contre les Mozabites relayés par les réseaux sociaux soient arrêtés et sévèrement punis».

«Ne pas jeter de l’huile sur le feu»
La lettre des notables dénonce en outre certains articles et reportages diffamatoires, erronés et outrageants touchant à l’histoire du M’zab. Avant d’appeler aussi à lutter contre l’idéologie «takfiriste» déniant aux Mozabites leur islamité. «Le système éducatif se doit de corriger certains manuels scolaires et appeler au respect de la différence des rites musulmans en condamnant les idées obscurantistes.»
Tout en saluant le travail accompli par les différents services de sécurité pour rétablir la paix, les notables demandent que les résultats des enquêtes menées sur les dépassements commis par certains agents des forces de l’ordre soient connus et leurs auteurs condamnés.
Par ailleurs, la lettre des notables dénonce l’utilisation de certains concepts pour qualifier les événements de Ghardaïa.
«Certains parlent de conflit entre ibadites et malékites, pour engager les malékites des autres régions dans le conflit, d’autres encore parlent de conflit entre Mozabites et Arabes afin d’impliquer les Amazighs d’Algérie et d’ailleurs dans le conflit.
D’autres encore utilisent le terme de minorité mozabite, et ce, pour toucher à l’unité nationale et attirer une intervention étrangère», estiment les notables, en notant que le conflit n’est autre que le fait des ennemis du développement de l’Algérie.
La lettre des notables du M’zab s’achève sur un appel aux médias télévisés et écrits d’éviter «de jeter de l’huile sur le feu» , car «le scoop ne peut émaner du mensonge et des rumeurs».
«La crédibilité de l’information exige une vérification sur le terrain», indiquent les notables, qui ajoutent : «Nous ne demandons pas aux médias d’être favorables à une partie, mais juste d’être professionnels et objectifs.» Et d’appeler les médias locaux à s’intéresser un peu plus à la gestion des affaires locales et à parler de ces lobbies qui veulent exclure les Mozabites.

Nadjia Bouaricha el watan

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