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Réactions à la publication : Le PAGS et le PAYS : CINQUANTE ANNÉES PLUS TARD de Sadek Hadjerès par :A.Bensaada

La publication du texte de Hadjeres et les réactions qu’il a suscité parmi les militants de l’ex-Pags et même au delà ( QO et RadioM,), remet au centre du débat cette question de « ligne du pags » dont certains militants , dès le début des années 80 déjà, avaient qualifiée publiquement, d’inadaptée, d’insuffisante voire de complètement en décalage avec les réalités politiques et surtout les tâches censées être celles d’un « parti d’avant-garde ». En effet, c’est un problème qui a existé depuis le début des années 80 après l’intronisation de Chadli par le « système »et l’ascension du théoricien de la 3ème voie, Abdelhamid Brahimi ( qui, cette semaine, revient de Londres pour faire les Unes d’une certaine presse algérienne (?) avide de sensationnel). Cette époque correspond, en gros, au reflux de l’influence qu’a eu le pags des années 70 notamment lorsqu’il appuyait les luttes démocratiques des étudiants et des travailleurs et malgré la répression parvenait à attirer le jeunes et moins jeunes qui voulaient construire le pays dans une voie socialiste. Au début des années 80, le pags a été « débordé » par la montée en puissance de la revendication démocratique dans ses expressions identitaires et culturelles mais aussi par la problématique de la protection des libertés individuelles, une revendication qu’il a sous-estimée , comme l’ensemble des partis d’obédience « marxiste-léniniste » du monde arabe,qui la considéraient comme « bourgeoise » donc, secondaire. A cela, il faut ajouter, les péripéties de la sortie de la clandestinité et du passage à la légalité, intervenues dans une impréparation totale de la direction politique de l’époque usée par l’activisme, les réflexes de la clandestinité et la routine car ayant été « à la barre » depuis trop longtemps et s’étant sacrifiée sans compter. Ces éléments ont accéléré la crise de « confiance en soi » parmi les cadres et militants du pags notamment ceux en contact avec les mouvements sociaux ouvriers, jeunes, intellectuels qu’ils n’arrivaient plus à influencer comme avant vu les orientations et mots d’ordre défensifs de cette époque alors que les forces sociales actives et progressistes étaient prêtes à s’engager dans la conquête des espaces de liberté politique que les islamistes avaient investis avec force et parfois avec une violence tolérée par le pouvoir de l’époque par calcul ou par conviction. La cause première du recul et de la perte d’influence et de la capacité à mobiliser du pags sont à chercher dans les hésitations de sa direction politique et son quasi refus d’investir de façon offensive le mouvement social revendicatif car sa vision du rapport de force social étaient obstruée par le poids donné aux luttes d’appareils et engluée dans la « fumeuse » politique des alliances qui pesaient plus lourds que la nécessité d’appuyer le mouvement social populaire en plein essor. Ce sont, de mon point de vue,ces aspects qui ont préparé les conditions psychologiques pour qu’un texte comme l’APRPI devienne et s’impose comme une base de débat pour le « 1er congrès du pags » en tant que parti légal… la nature ayant horreur du vide !

Il est trop facile, des années plus tard, de distiller quelques informations genre  » j’ai dis au rédacteur de l’APRPI » ceci ou cela » et il m’a répondu  » patati patata »… Dans un tel contexte, la seule attitude digne pour ce responsable (S.H) -qui était presque, à cette époque, aussi adulé que l’était Kim il Sung,- était de prendre une position franche et nette de défiance par rapport à cette ligne, d’exprimer franchement son désaccord, d’argumenter et de faire une proposition alternative. Mais au lieu et place de ce climat de débat franc « entre camarades » , il n’était question que de « cris et chuchotements »… Rien qui puisse ressembler à un signal ou une alerte politique et surtout une marque de confiance vis-à-vis de la « base » et de respect à l’intelligence des militants. Et c’est pourquoi j’affirme que Hadjeres était « coupé » des militants de base, les « sherpas » du parti, trop méfiant qu’il était -on peut le comprendre, à titre personnel, mais pas en termes politique- pour se frotter à eux, sentir leurs espoirs, leur détermination, leurs doutes….Beaucoup de militants à qui, au passage, ils rend hommage et étaient en contact des réalités souvent amères de la « gestion du parti » (par le centralisme) et notamment le peu de cas apporté au « moral des troupes » , au côté humain et à la formation des cadres et militants. Aussi, face à une proposition unique, nombreux sont ceux qui ont suivi leurs instincts et qui ont tenté de se préserver des effets dévastateurs de ce qui devenait une lutte qui les dépassait et dont ils ne percevaient ni les finalités et ni même les dessous même s’ils ressentaient ces « embrouilles » comme les contrecoups de la chute du Mur de Berlin et de la débâcle du socialisme réel…. Les séquences suivantes ayant conduit à la « désintégration » du pags en plusieurs « particules » sont un résultat logique des faits précédents : l’impréparation aux élections communales et le manque de clarté de la ligne politique ainsi que le score lilliputien obtenu à ce scrutin ont ébranlé plus d’un et entamé la motivation des militants, carburant essentiel et vital de toute formation politique …surtout celle qui affiche l’objectif de « faire la Révolution sociale » !!!

S’étonner que, dans un tel contexte, les réelles ou supposées manœuvres des anciens du Malg ou de l’ALN – qui ressemble un peu à l’argument de certains nationalistes quant au rôle des DAF au sein du pouvoir d’État pour justifier les dérives de la ligne du 1er Novembre 54 et de l’esprit du congrès de la Soummam – relève d’une attitude puérile. Cela explique les critiques des militants (ou proches) du pags ayant réagis à la lecture « Hadjeressienne » du déclin et de la dissolution du pags et par d’autres qui refusent de faire leur autocritique, se suffisent de la thèse que le « pags a été victime de « redresseurs » infiltrés par la SM ». C’est une thèse ancienne rendue publique en 1993 par une journaliste proche du pags et parente à l’interviewé, un ex-responsable du pags. Je l’ai compris, pour ma part, comme une forme de dénonciation, un peu tardive, il faut le préciser. Plus tard, j’ai su que cette attitude est à mettre sur le compte d’une rancune née d’un problème de sanction disciplinaire subie par le responsable (interviewé) pour avoir enfreint les règles élémentaires de sécurité dans la situation de clandestinité alors qu’il l’impute, dans sa relation des faits, à un « dégommage » pour des raisons de divergence dans la ligne politique ! Mais on n’a jamais rien su de cette  » ligne alternative ».

Mais au final, que doit-on retenir de ces témoignages et des réactions suscitées ? Sont-ils d’un quelconque intérêt au moment où l’Algérie, ( SOCIÉTÉ, NATION ET ETAT) a tant perdu et risque de perdre encore plus tant du point de vue de ses ressources humaines, ressources matérielles que dans sa capacité collective à poursuivre le mouvement historique de parachèvement de l’indépendance politique nominale par une indépendance économique et une souveraineté effectives?

Ce qui, à mon humble point de vue, est en jeu, c’est de redonner aux citoyens notamment les travailleurs manuels et intellectuels salariés et indépendants et autres créateurs de richesses, la force morale de défendre leurs droits fondamentaux, de s’organiser et de se défendre contre l’oligarchie compradore et vassal qui, pour assouvir ses intérêts égoïstes et mesquins, est en train de transformer une Nation que ses meilleurs filles et fils ont rêvé comme une expérience originale d’état républicain, démocratique et social , éclairant les luttes des peuples des pays ex-colonisés du Sud en…. minable république bananière.

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