Histoire

Surnaturel…

Fardeheb Zokha
Surnaturel…
Hommage à Said MEKBEL

Abderrahmane, aujourd’hui j’ai eu une vision merveilleuse. Les yeux fermés, je souris heureuse de te voir.
Impassible, tout vêtu de blanc, riant de ton rire candide et
bon. Tu es assis au pied d’un grand chêne millénaire à même le gazon. A tes côtés, il y a ton ami des grands parcours : Alloula. Vous êtes appuyés contre l’arbre. Ton ami discute à voix haute comme sur scène. Mais…vous semblez attendre un heureux évènement.
Vous n’êtes pas seuls, la compagnie est fort agréable Il y a les nombreuses victimes du terrorisme :
« MORTS POUR LA REPUBLIQUE. »
Entre autres les jeunes enfants fauchés à la vie alors qu’ils n’avaient pas dix ans. Ils entonnaient l’hymne national un premier Novembre à la gloire des martyrs de la révolution. Une bombe a vite fait de les museler à jamais…
Saida, Zoulikha….et toutes les autres victimes ravies à la vie, à la fleur de l’âge parce qu’elles avaient dit NON au mariage de jouissance, au viol abject.
Et …là …juché sur un nuage, Cheb Hasni qui chantait le raÏ l’amour, la joie de vivre.
Vous l’écoutiez heureux. Toi tu gesticulais, expliquant Marx, le socialisme, l’endettement de l’Algérie, l’intégrisme ravageur et sauvage.
Vous êtes tous assis autour d’un thé, vous avez l’air de monter une pièce de théâtre. Puis d’un coup, tout le monde se lève d’un bond et applaudit. Vous regardez, souriants, une personne qui vient vers vous prestement. Elle approche et c’est l’euphorie, les éclats de rire, les accolades ; Ce personnage a l’air bien ému et en même temps excité ; il rit et s’exclame à la fois : « Vous voyez les amis, ils m’ont tendu un piège mais ils ne m’ont pas eu, je leur ai échappé. Ils croient m’étouffer comme vous tous, mais qu’ils sachent que nous ne pouvons que mieux nous exprimer à présent, par la voix et les actes de ceux à travers qui nous perpétuons la vie . Nos enfants, petits enfants sauront entretenir la mémoire vive. Mes idées, vos idées et celles de tous ceux qui font et feront l’Algérie progressiste ne sont pas mortes elles vaincront dénonceront et parleront de nous.
Toujours dans ma somnolence, je regarde : Mais quel est cet homme qui vient d’arriver ?
C’est SAID MEKBEL. Ce 03 Décembre 1994, qui arrive vers vous. Vous l’accueillez amicalement. « Bonjour camarade parmi nous ».
Il prend place et se met à relater les derniers évènements depuis votre départ.
Etes-vous réellement morts ?
Vos pas, certes se sont arrêtés ici bas, mais ce n’est que pour un autre départ, un autre voyage. Et c’est par la plume de ceux que vous avez eu la sagesse d’instruire que vous continuez le combat.
Vous ferez ainsi taire les armes, sécher les larmes et briller les yeux des enfants.
Zokha FARDEHEB
Oran, 04/12/1994.
Texte écrit aux lendemains de l’assassinat de Said Mekbel
— avec Nazim Mekbel et 48 autres personnes.
Photo : Fardeheb Zokha Surnaturel… Hommage à Said MEKBEL Abderrahmane, aujourd’hui j’ai eu une vision merveilleuse. Les yeux fermés, je souris heureuse de te voir. Impassible, tout vêtu de blanc, riant de ton rire candide et bon. Tu es assis au pied d’un grand chêne millénaire à même le gazon. A tes côtés, il y a ton ami des grands parcours : Alloula. Vous êtes appuyés contre l’arbre. Ton ami discute à voix haute comme sur scène. Mais…vous semblez attendre un heureux évènement. Vous n’êtes pas seuls, la compagnie est fort agréable Il y a les nombreuses victimes du terrorisme : « MORTS POUR LA REPUBLIQUE. » Entre autres les jeunes enfants fauchés à la vie alors qu’ils n’avaient pas dix ans. Ils entonnaient l’hymne national un premier Novembre à la gloire des martyrs de la révolution. Une bombe a vite fait de les museler à jamais… Saida, Zoulikha….et toutes les autres victimes ravies à la vie, à la fleur de l’âge parce qu’elles avaient dit NON au mariage de jouissance, au viol abject. Et …là …juché sur un nuage, Cheb Hasni qui chantait le raÏ l’amour, la joie de vivre. Vous l’écoutiez heureux. Toi tu gesticulais, expliquant Marx, le socialisme, l’endettement de l’Algérie, l’intégrisme ravageur et sauvage. Vous êtes tous assis autour d’un thé, vous avez l’air de monter une pièce de théâtre. Puis d’un coup, tout le monde se lève d’un bond et applaudit. Vous regardez, souriants, une personne qui vient vers vous prestement. Elle approche et c’est l’euphorie, les éclats de rire, les accolades ; Ce personnage a l’air bien ému et en même temps excité ; il rit et s’exclame à la fois : « Vous voyez les amis, ils m’ont tendu un piège mais ils ne m’ont pas eu, je leur ai échappé. Ils croient m’étouffer comme vous tous, mais qu’ils sachent que nous ne pouvons que mieux nous exprimer à présent, par la voix et les actes de ceux à travers qui nous perpétuons la vie . Nos enfants, petits enfants sauront entretenir la mémoire vive. Mes idées, vos idées et celles de tous ceux qui font et feront l’Algérie progressiste ne sont pas mortes elles vaincront dénonceront et parleront de nous. Toujours dans ma somnolence, je regarde : Mais quel est cet homme qui vient d’arriver ? C’est SAID MEKBEL. Ce 03 Décembre 1994, qui arrive vers vous. Vous l’accueillez amicalement. « Bonjour camarade parmi nous ». Il prend place et se met à relater les derniers évènements depuis votre départ. Etes-vous réellement morts ? Vos pas, certes se sont arrêtés ici bas, mais ce n’est que pour un autre départ, un autre voyage. Et c’est par la plume de ceux que vous avez eu la sagesse d’instruire que vous continuez le combat. Vous ferez ainsi taire les armes, sécher les larmes et briller les yeux des enfants.

Zokha FARDEHEB Oran, 04/12/1994

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