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Assemblée constituante: point de vue de Aziri Nazim

Pour ceux et celles qui connaissent en profondeur les caractéristiques géopolitiques et socio-économiques de l’Algérie, ils savent pertinemment que réclamer une assemblée constituante par des circonstances de crise de régime et sans passer préalablement par une élection présidentielle est, sans exagération aucune, synonyme de suicide politique de la nation algérienne. Mais pour comprendre les dangers d’une telle démarche qui, rappelons-le, ne fait pas l’unanimité au sein de la classe politique, il faudra peut-être expliquer aux profanes, ne serait-ce que sommairement, ce qu’est une assemblée constituante et en quoi elle diffère d’un parlement ordinaire. Ce dernier a pour missions principales de promulguer des lois et assurer notamment un équilibre du pouvoir avec ses deux autres composantes, qui sont l’exécutif et le juridique. En revanche, une assemblée constituante a pour mission principale, comme son nom l’indique, l’élaboration d’un nouveau texte de la loi fondamentale sur la base d’un compromis des membres qui composent l’assemblée élue.

En d’autres termes, une constituante et de par les circonstances de faits qui caractérisent la scène nationale depuis le 22 février, ne s’imposera aucune restriction à débattre des questions qui relèvent des lignes de fractures à ne pas franchir, comme les constantes nationales. Quand on connait aussi l’ancrage des divergences idéologiques qui nous ont déjà causé une décennie de feu et de sang, on imagine aisément les risques encourus. Les exemples sur les difficultés techniques et politiques dans l’histoire sont nombreux. Parmi les plus récents, le cas de l’Égypte, l’assemblée constituante mise en place à la suite de la révolution de 2011, est boycottée par les libéraux qui ont dénoncé sa mainmise par les Frères musulmans.

La suite des événements, on la connaît… En Tunisie, dont les enjeux sont loin d’être les mêmes qu’en Algérie, ils sont encore plus complexes, l’histoire retiendra que, près de deux ans après son élection, l’assemblée constituante n’est pas parvenue à boucler une constitution, sans parler des fractures sociales qu’elle a engendrées. Par ailleurs, et sur un volet plus technique, une question d’ordre stratégique s’impose : l’Algérie et face aux défis sécuritaires et économiques auxquels elle fait face, peut-elle s’offrir le luxe de supporter encore des années d’indécision, de vide constitutionnel et son lot de gouvernements provisoires alors qu’une crise économique sérieuse se profile à l’horizon 2021 ? Faut-il dans ce sens oublier que le « Hirak » du 22 févier et en dépit de ses revendications politiques, trouve d’abord son origine dans des problèmes économiques et d’injustices sociales hérités du système qui a institué la corruption et corrompu la justice ? Autres problèmes qu’il faut prendre en compte dans le cas de l’Algérie est relatif aux prérogatives et les pouvoirs que peut s’attribuer une constituante en l’absence d’un président élu démocratiquement et face aux appels de certaines parties douteuses à exclure l’armée du jeu politique. C’est là un autre sujet à débattre, et pas des moindres…

Aziri Nazim

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