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Quels choix pour les pays de la périphérie du centre capitaliste?

Depuis le passage du capitalisme à son stade impérialiste dans le premier quart du vingtième siècle, les questions nationales et internationales sont indissociablement liées. Le système impérialiste mondial surdétermine l’ensemble des autres questions (démocratique, de construction nationale, sociale, agraire, etc.) et constitue le cadre dans lequel se déploie les contradictions sociales dans chaque pays de la périphérie. Le système impérialiste mondial n’est cependant pas un invariant historique qui serait identique de sa naissance à son abolition. Cette longue période historique connaît des « âges » qui se définissent selon le rapport des forces mondial entre forces progressistes (lutte des prolétaires et des paysans pauvres et sans-terre, mouvement de libération nationale, pays socialistes, etc.) et forces réactionnaires  (bourgeoisie des Etats impérialiste, bourgeoisie compradore dans les Etats de la périphérie). Pour simplifier en caricaturant disons que nous avons connus quatre âges depuis la naissance de l’impérialisme : 

  • L’âge du colonialisme dominant jusque 1945 marqué à la fois par la montée du mouvement de libération nationale, l’isolement et l’encerclement de l’URSS et un rapport des forces largement en faveur de l’impérialisme. 
  • L’âge des offensives populaires marqué à la fois par la défaite du nazisme, une URSS renforcée par sa contribution héroïque à cette défaite et une radicalisation des luttes de libération nationale aboutissant à la séquence des décolonisations à la fois victoire des peuples et masques d’une nouvelle dépendance néocoloniale. 
  • L’âge de la contre-révolution mondiale déclenchée par la disparition de l’URSS et avec elle de tous les équilibres issus de la seconde guerre mondiale et des combats de décolonisation. Cet âge allant globalement des années 90 aux années 2010 est marqué par les guerres de balkanisation ( Irak, Soudan, Syrie, Lybie, etc.), la destruction des acquis de la période précédente (nationalisations, services publics, réformes agraires, conditions d’existences des classes populaires, etc.) et un hégémonisme états-unien sans plus aucun contre-poids. 
  • L’âge du multilatéralisme comme réaction à l’hégémonisme états-unien marqué par des réactions économiques et politiques (ALBA en Amérique Latine, BRICS, etc.), de nouvelles configurations militaires (défaite états-unienne en Afghanistan, intervention russe en Syrie jurant avec le laisser-faire en Lybie, guerre d’Ukraine, coups d’Etat patriotiques en Afrique subsaharienne, 7 octobre et offensive palestinienne, etc.). En dépit de l’hétérogénéité de cette réaction anti-hégémonique, celle-ci signifie la fin de la séquence de contre-révolution mondiale qui à son tour suscite des réactions du système impérialiste mondial pour faire rentrer dans le rang les récalcitrants. 

C’est dans ce nouveau contexte que se pose désormais l’ensemble des contradictions qui caractérisent la société algérienne comme d’ailleurs toutes les sociétés de la périphérie. 

Ce nouveau contexte suscite des contradictions entre les différentes fractions des classes dominantes qui sont sommées par la réalité de choisir leur camp. Trois postures logiques sont possibles pour chacune de ces fractions : soit l’alignement sur l’impérialisme, soit l’anti-impérialisme conséquent qui suppose de disposer d’une base sociale populaire pour pouvoir résister aux déstabilisations impérialistes inévitables, soit l’illusion de préserver une indépendance et une souveraineté nationale par le compromis avec l’impérialisme.   

Certaines mesures du gouvernement Tebboune vont dans le sens de la défense de la souveraineté et de la construction nationale et sont en conséquence objectivement anti-impérialiste alors que d’autres ne permettent pas de réunir les conditions d’un soutien populaire (droit de grève, niveau des salaires, droits démocratiques, etc.). Les progressistes et communistes en Algérie doivent mettre tout en œuvre pour appuyer les premières et rejeter les secondes en oubliant jamais que le pays est objectivement menacé. Les questions sociales et nationales sont plus que jamais indissociablement liées. Il est illusoire d’espérer faire avance des revendications sociales dans un pays soumis à des violations de sa souveraineté ou objet d’un projet de balkanisation. A l’inverse, il est tout autant illusoire de prétendre résister à l’impérialisme sans un soutient des classes populaires. 

S.B. octobre 2024

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